Les monarchies ne cessent de s’adapter afin de rester pérennes. Elles ont été parmi les premières institutions d’État à reconnaître le mariage pour tous qui autorise les personnes de même sexe à se marier civilement et obtenir les mêmes droits que tout un chacun. Souvent contrariés ou cachés dans le passé, tâches indélébiles sur de nombreux illustres blasons, le sang bleu a décidé désormais de vivre au grand jour ses amours « oscar wildiens » et d’ajouter un peu plus de couleurs à leurs noms prestigieux.
Lord Ivar Mountbatten est un cousin au second degré du roi Charles III, le parrain de Lady Louise Windsor. Longtemps ignoré des tabloïds britanniques, il s’est soudainement retrouvé l’objet de toutes les attentions par les journalistes en 2016. Deux ans après la signature par la reine Elizabeth II de la loi autorisant les personnes de même sexe à se marier, l’aristocrate poivre et sel (actuellement âgé de 60 ans) a décidé de révéler au grand jour sa relation intime avec le très blond James Coyle, son amant de longue date, stewart de son état, qu’il a épousé depuis. Les deux hommes se sont rencontrés en Suisse, dans une station de ski, et ont très vite entamé une relation secrète. Père de 3 enfants, Lord Ivar Mountbatten avait déjà divorcé à l’amiable de Pénélope Thompson avec laquelle il a partagé sa vie depuis presque deux décennies. Un coming-out qui a jeté un pavé dans la mare et qui a eu une valeur symbolique au Royaume-Uni à l’heure où le reste de l’Europe se déchirait profondément sur le sujet, divisée en partisans et opposants d’une réforme bouleversant le socle de la famille traditionnelle.
Un coming-out historique
En 2021, c’est le champion des catholiques qui a surpris son monde. Bien que sa relation avec son compagnon de longue date n’était plus un secret pour personne, les deux hommes s’affichant régulièrement lors de soirées mondaines, le prince Franz de Wittelsbach a décidé de ne plus cacher l’amour qu’il voue au docteur Thomas Greinwald. Tout comme Lord Ivar, cette sortie officielle du placard par le prétendant au trône de Bavière, alors âgé de 87 ans, a été hautement médiatisée. Ironie de l’Histoire, sa maison compte le roi Louis II parmi ses personnages truculents. Incarnation du romantisme, le monarque construit des châteaux, fuit la politique, se réfugie dans un monde qui n’appartient qu’à lui où il règne sans les inconvénients de sa charge. C’est aussi un homme tourmenté par ses amours coupables dans un siècle qui n’accepte pas sa différence. Un génie frustré, qui vit des relations à la fois passionnées et honteuse avec des hommes de toute condition, dont le destin sera tragique, placé au rang des icônes contemporaines gays. Dans ses mémoires, le prince Franz de Bavière « Spectateurs du premier rang » n’a pas hésité à raconter cette vie à deux qu’il partage depuis des décennies avec son prince des coeurs, crispant au passage les plus conservateurs de ses partisans. « Dans ma famille et aussi dans la société, Thomas est maintenant accepté comme une évidence » se réjouit le prince de Bavière, grand collectionneur, qui regrette toutefois de n’avoir pu se dévoiler plus tôt. Nombre de maisons royales affichent d'ailleyrs un soutien récurrent à des associations de lutte contre l'homophobie.
Un prince devenu porte-parole du combat contre l'homophobie
Pourtant, tout n’est pas aussi rose arc-en-ciel dans le Gotha international où les courbes des corps des princes et des princesses se dévoilent plus facilement que dans le passé. Héritier d’une monarchie emportée à l’indépendance de l’Inde, le prince Manvendra Singh Gohil, 57 ans, a dû se battre sur deux fronts pour faire accepter cette différence honnie dans son pays. Contraint de se marier, sa vie maritale a été un désastre fondé sur un mensonge. « Je pensais qu’après le mariage, tout irait bien. Qu’avec une femme, j’aurais des enfants, que je deviendrais “normal” et que je trouverais la paix »confie-t-il sur le plateau de la star des shows, Ophrah Winfrey. Sa famille a bien tenté de le « faire soigner » mais en vain. Par force, elle a dû accepter l’homosexualité de Manvendra Singh Gohil, devenu le porte-parole d’une communauté souvent la victime d’agressions sauvages. Il est également devenu une icône pour les gays et lesbiennes d’Inde et a créé une fondation (Lakshya Trust) afin d’apporter « un soutien social et financier, pour qu'ils/elles puissent faire leur coming-out, sans qu'ils ou elles ne soient affecté » par la violence de leurs familles explique aux médias cet héritier. Aujourd’hui, il vit le parfait amour avec un américain, DeAndre Richardson, avec lequel il a convolé en justes noces et avec lequel il montera sur le trône de Rajpipla au décès de son père.
Le gay Gotha se dévoile
L’Histoire a compté de nombreux monarques et de princes qui ont eu des aventures homosexuelles. Elle les a parfois jugés avec sévérité même s’ils n’ont pas démérité sur les champs de bataille, s’empressant d’honorer reines et princesses afin de remplir leur devoir premier : assurer leur descendance et le nom de leurs familles Alexandre le Grand, Héliogabale, Edouard II d’Angleterre, Henri III de France, Frédéric le Grand, Louis II de Bavière, Sadoq Bey ou encore Mangwa du Bouganda sont parmi les plus connus d'entre eux. Les femmes ne sont pas absentes pour autant du « gay Gotha ». Au cours de l’été 2021, la presse espagnole a annoncé que María Juncadella Hohenlohe, famille princière indissociable de l’histoire de l’Allemagne, allait passer la bague au doigt à l’élue de son cœur. Avec sa fiancée Carlota Redón, elles ont fondé la marque de gin Oceánica, produite dans la région de Galice en Espagne où elles vivent sans craindre le moindre jugement homophobe de la part de leurs contemporains. Un coup de foudre pour les deux femmes d'une trentaine d'années qui ont utilisé les réseaux sociaux pour afficher leur glamour aux yeux du monde.
Si certains, parmi les membres de la noblesse, n’entendent pas se révéler encore aujourd’hui pour diférentes raisons, bien que leurs secrets soient connus, ni le revendiquer, vivre ouvertement leur passion a été une évidence pour María Juncadella Hohenlohe et Carlota Redón. Des fiançailles qui a toutefois fait des émules dans l'aristocratie. Une simple histoire d’amour qui appellera certainement d’autres coming-out dans l’avenir. Le Gotha a désormais ses « Queens et Kings » et ses « Young and Royals », n’en déplaise aux esprits chagrins.
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