Mystérieuse disparition du prince Faysal ben Abdullah Al Saoud

Mohammed Ben SalmaneOù est donc passé le prince Faysal ben Abdullah Al Saoud ? Depuis des mois les médias internationaux s'interrogent sur le sort de ce prince de la Maison royale d'Arabie Saoudite. Arrêté dans le cadre d’une campagne anti-corruption mise en place par le prince héritier Mohammed Ben Salmane, il n’a pas été revu depuis mars 2020. Officiellement détenu au secret, sa famille n’a pas été autorisée à le voir depuis son emprisonnement. Pour beaucoup de spécialistes du Proche et Moyen–Orient, cet ancien président du Croissant rouge a été « éliminé », nouvelle victime d'une purge qui se poursuit et qui est menée avec virtuosité au sein de la famille royale par le fils du roi Salmane. Une situation qui inquiète de plus en plus Washington. 

Faysal ben Abdullah al SaoudArrêté en mars 2020, le prince Faysal ben Abdullah Al Saoud  a été immédiatement mis au secret sans que sa famille ne puisse l’approcher ni lui parler. Une décision prise par le prince Mohammed Ben Salmane (MBS) qui soupçonne le fils de feu le roi Abdallah de détournement de fonds. Ce n’est pas la première fois qu’il fait l’objet d’une accusation de corruption par l’héritier au trône qui l’avait déjà embastillé à l’hôtel Carlton, trois ans auparavant, dans le cadre d’une vaste purge au sein de la famille royale des Saoud qui a touché plus de 300 personnes. A cette époque, le prince Faysal avait été libéré après avoir cédé tous ses avoirs à Mohammed Ben Salmane sans que cela ne soit acté par la justice. « Malgré les vagues de protestations, le comportement anarchique des autorités saoudiennes,  de facto sous son régime, se poursuit sans relâche » affirme Michael Page. « Il est probable que maintenant, nous soyons obligé d’ajouter de nouveau le prince Faysal aux centaines de détenus en Arabie saoudite sans aucune base légale claire » poursuit le directeur adjoint du Moyen-Orient à Human Rights Watch. 

Affiche de propagande en faveur des SaoudFaysal ben Abdullah Al Saoud, 43 ans, a effectué ses classes militaires à l’école royale militaire de Sandhurst et devenu par la suite un des conseillers privés de son père alors prince héritier dans les années 1990. Il prend la direction de la sécurité nationale durant une décennie puis des services secrets saoudiens de 2000 à 2006. Ministre, président du Croissant rouge, c’est un prince incontournable qui agace Mohammed Ben Salmane. En 2016, il est brutalement limogé sans explications. Bien que lavé de tous soupçons, les humiliations vont continuer. En pleine crise de covid-19, l’armée fait irruption chez lui et accuse le prince d’avoir été infecté par le coronavirus. Ceinturé, « on lui injecte un produit sans qu’il sache de quoi il s’agit » écrit dans ses colonnes Business Insider. Un quotidien qui pointe du doigt la responsabilité de MBS et qui n’hésite pas à écrire que l’héritier règne en lieu et place de son père Salmane Ben Abdelaziz Al Saoud, 85 ans. Un souverain en mauvaise santé, demi-oncle du prince Faysal et qui n’a pas bougé le petit doigt pour sauver son neveu. 

Roi Salmane« La disparition de Faysal est inquiétante d’autant que son enlèvement s’est fait alors qu’il était seul. Il souffrait déjà de dépression, de problèmes cardiaques, d'un autre divorce [et] la peur de l’inconnu » déclare une source anonyme. Contactée par Business Insider, l’ambassade saoudienne à Washington n’a pas voulu répondre aux questions du magazine. De quoi inquiéter l’administration américaine, elle-même, qui fait pression pour que la monarchie relâche tous les princes encore en prison. « Les droits de l'homme sont au cœur de la politique étrangère de Joe Biden qui met l'accent sur le respect de ceux-ci dans nos relations bilatérales avec nos partenaire saoudiens » confirme un porte-parole du département d'État. « Personne en Arabie saoudite n'est à l'abri de la répression arbitraire du gouvernement, même les princes de premier plan. La détention prolongée de membres de la famille royale sans le moindre respect des procédures judiciaires démontre clairement le mépris total de Mohammed ben Salmane et de ses fonctionnaires pour l'équité et la primauté du droit »  dénonce encore Human Rights Watch. Monarchie gérontocrate, elle est soudainement devenue héréditaire avec la nomination de MBS comme prince héritier en juin 2017. Une décision qui a fait naître de fortes tensions entre les différentes branches des Saoud. 

Gardes du palais royal de Riyad.Pour l’organisation de défense des droits de l’homme, le prince Faysal ben Abdullah Al Saoud  est décédé mais difficile de prouver. Il n’a pas été d’ailleurs le seul à subir les affres des autorités royales. Deux autres princes de haut rang, le prince Ahmed Ben Abdulaziz, frère du roi Salmane, le prince Mohammed Ben Nayef, ancien prince héritier et ministre de l'Intérieur destitué par le roi Salmane, ont été placés en résidence surveillée pour une durée indéterminée. Alors que les purges se poursuivent dans tous les ministères (300 autres fonctionnaires ont été arrêtés ces derniers jours, la pétromonarchie saoudienne s'est retrouvée au cœur du scandale Pegasus. Selon une enquête réalisée conjointement par 17 médias différents, les Saoud auraient ordonné la mise sous surveillance  grâce à ce logiciel espion « de journalistes, hommes et femmes politiques, militants des droits humains et chefs d'entreprise ». Mohammed Ben Salman a catégoriquement rejeté ce rapport qui le met en cause. Une fois de plus.

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Date de dernière mise à jour : 13/07/2022

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