Le prince Alexandre de Serbie rend hommage au roi Pierre Ier

« Il était le roi serbe le plus aimé. Les gens le respectaient et l'aimaient parce qu'il avait de la compréhension et de l'amour pour eux. Il était fidèle à son pays, à ses racines, à son héritage et, surtout, à son peuple. ». Francophile averti et fondateur de la maison royale des Karageorgévitch, le roi Pierre Ier est décédé le 16 août 1921. C’est au mausolée royal d’Oplenac, un édifice religieux qui sert de nécropole aux rois de Yougoslavie et autres princes de cette famille indissociable de l’histoire serbe, que le prince héritier Alexandre II est venu rendre hommage à son arrière-grand-père dont on fête le centième anniversaire de sa mort. 

C’est le patriarche Porphyre qui a accueilli sur le parvis de l’église Saint-Georges le prince Alexandre II, héritier de la couronne de Serbie. C’est ici à 80 kilomètres au sud de Belgrade que reposent les anciens rois de Yougoslavie, parmi lesquels figurent le roi Pierre Ier, fondateur de la dynastie des Karageorgévitch décédé le 16 août 1921 à 77 ans. Venu lui rendre hommage, son arrière-petit fils a rappelé que « le roi Pierre Ier n'était pas seulement un roi libérateur, qui nous a doté, en tant que commandant suprême de l'armée de libération héroïque, de grandes victoires lors des guerres des Balkans et lors de la Première Guerre mondiale. Ni le premier souverain constitutionnel, dont on se souvient comme d’un européen libéral avec une vision démocratique universaliste, il était aussi le roi serbe le plus aimé ».  

Lors de son sermon, se  référant aux paroles de l'Évangile et entouré de divers membres de l'épiscopat, le patriarche serbe a rappelé l'importance du sens de l'existence, ainsi que du repentir, affirmant que puisque « dans les Saintes Écritures, il est écrit que toute autorité vient de Dieu », il était donc naturel que Pierre Ier ait unifié sous son sceptre les croates et les slovènes. « Se souvenant du passé glorieux et des souffrances enduré par son peuple », le patriarche a évoqué la mémoire de ce « roi libérateur qui avait emporté avec lui durant le premier conflit mondial, le diptyque des icônes des Saints Apôtres Pierre et Paul, aujourd’hui un symbole d’harmonie pour le peuple serbe ». C’est en 1903 que Pierre Karageorgevitch monte sur un trône déjà ensanglanté par un régicide. Dans la nuit du 28 au 29 mai, qui précède sa proclamation comme souverain, une conjuration ourdie par ses partisans, réunis au sein de l'organisation de la « Main noire »,  va se débarrasser très violement de ses rivaux de longue date, les Obrenovitch. Derrière ce coup d’état, des influences étrangères qui se battent dans les anti-chambres du palais de Belgrade, saccagé par les putschistes qui défenestrent le roi Alexandre Ier, jugé bien trop proche de l’Autriche-Hongrie, et son épouse. Un double assassinat condamné par l’ensemble des gouvernements européens mais qui prendront acte du changement de dynastie. 

« Les gens le respectaient et l'aimaient parce qu'il avait de la compréhension et de l'amour pour eux. Il était fidèle à son pays, à ses racines, à son héritage et, surtout, à son peuple. Il n'est pas seulement un souvenir d'une partie de notre glorieux passé. Il est notre inspiration pour un meilleur avenir » explique le prince Alexandre II à la presse qui est présente. Liberté de syndicats, d’opinion, création de collèges et de lycées, presse libre, réformes de l’armée, Pierre Ier fait entrer la Serbie dans le XXème siècle et renforce ses liens avec la France ( ayant combattu en 1870 sous l’uniforme impérial et blessé à Orléans, une promotion Saint-Cyr porte son nom) et la Russie. Mais sa volonté expansionniste agace beaucoup Vienne qui n’a toujours pas digéré que le souverain se soit débarrassé de son protégé et qui reproche à «  l’oncle Pierre » d’être sous le contrôle de la Main noire. Cette société secrète nationaliste qui va organiser l’assassinat, le 28 juin 1914 à Sarajevo, de l’archiduc François-Ferdinand de Habsbourg-Lorraine, prélude au déclenchement de la Première guerre mondiale.  Malade, épuisé, le monarque laisse la régence à son fils le prince Alexandre et aura le temps encore de marquer les esprits en prenant la tête de ses troupes en Albanie lors de la grande offensive de 1915.

Une couronne de fleur a été déposée sur son catafalque par le Comité pour le souvenir des guerres de libération de la Serbie en présence de la représentante du président serbe, Darija Kisic Tepavcevic, actuelle ministre du Travail, de l’Emploi, des Anciens combattants et des Affaires sociales. Des membres du ministère de la Défense sont également venus rendre hommage à un souverain épris des droits de l’homme et de littérature française avant de s'incliner devant ses regalia exposés pour l’occasion, couronne, écharpe, bouton de cape et sceptre ayant appartenu au roi Pierre Ier. Le prince Alexandre II, accompagné d'un certain nombre de délégués du conseil de la Couronne, a remercié l’assistance « pour leur soutien et leur contribution à la mémoire du roi Pierre Ier qui continue de vivre dans le cœur du peuple serbe ». 

« La personnalité et le travail du roi Pierre Ier nous obligent tous, en particulier sa descendance, à faire de notre mieux  pour rendre notre Serbie encore plus forte. La mémoire et le respect pour le roi Pierre nous obligent à ne jamais nous montrer prétentieux, à toujours nous rappeler d'où nous venons et à nous efforcer sans compromis à atteindre un objectif ultime - une Serbie meilleure et plus moderne » a déclaré le prince Filip, fils cadet du prince Alexandre II de Serbie, venu avec son épouse et son fils. Il y’a quelques jours, à Kikinda, le prétendant au trône de Serbie a inauguré un buste de son arrière-grand-père, considéré par une majorité de serbes comme un héros national.

Copyright@Frederic de Natal