Face à l’accord commercial inégal conclu entre l’Union européenne et les États-Unis, plusieurs mouvements royalistes français ont décidé de monter au créneau. Des voix alternatives qui dénoncent une soumission et un accord de la honte.
L’Union européenne, humiliée sur un green écossais. La scène est presque grotesque, digne d’un roman de Kafka : le 27 juillet 2025, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a paraphé un accord commercial avec les États-Unis, fruit des menaces de droits de douane brandies par le président Donald Trump, dans un club de golf. Un texte qui engage l’Europe à importer 750 milliards d’euros d’énergie fossile américaine et à investir 600 milliards supplémentaires sur le sol américain. En échange ? Une taxe douanière « limitée » à 15 %, un chiffre que certains caciques de Bruxelles voudraient faire passer pour une victoire diplomatique.
Mais derrière ce chiffre se cache une réalité bien plus sombre : un marché européen désormais vassalisé, une industrie française sacrifiée — de l’aéronautique aux spiritueux — et une souveraineté continentale plus théorique que jamais, l'échec significatif de l'Union européenne (UE) qui a perdu toute crédibilité ou légitimité auprès de ses populations, une France devenue une vague satrapie d'un système qui s'ingère constamment dans ses affaires internes. Un nouvel épisode de soumission qui a fait vivement réagir… les monarchistes.
Trois courants royalistes, une même indignation
Face à ce qu’ils considèrent comme un acte de capitulation historique, les trois principaux mouvements royalistes français ont réagi d’une même voix, chacun selon sa sensibilité mais avec une indignation commune : la dénonciation d’une Europe vassalisée aux intérêts américains, incapable de défendre ceux des peuples qu’elle prétend représenter.
L’Action française (AF), fidèle à sa tradition d’hostilité au mondialisme et à son attachement viscéral à la souveraineté nationale, a dénoncé un accord « désastreux » et « profondément déséquilibré » qui accentue la dépendance de l’Europe à l’égard des États-Unis. Selon le plus vieux mouvement royaliste fondé par Charles Maurras, ce texte consacre le déclin stratégique de l’Union européenne, tout en révélant son impuissance structurelle. La formation maurrassienne pointe particulièrement le rôle d’Ursula von der Leyen, qu’elle accuse de servir avant tout les intérêts de l’Allemagne, notamment son industrie automobile, au détriment des secteurs d’excellence français comme l’aéronautique et les vins et spiritueux. L’AF a même appelé à la démission immédiate de la présidente de la Commission, tout en rêvant ouvertement d’une explosion de l’Union européenne,compromise dans un scandale de grande ampleur.
La Nouvelle Action royaliste (NAR), qui se revendique d’un royalisme démocratique et républicain dans sa forme gaulliste, dresse un constat tout aussi alarmant. Elle parle sans détour d’une « reddition » de la Commission européenne et accuse Bruxelles d’avoir trahi les intérêts français. Selon la NAR, l’accord marque la faillite totale du projet macronien de « souveraineté européenne » : en acceptant d’importer massivement de l’énergie fossile américaine, d’acheter des armes aux États-Unis sans garanties d’usage autonome, et de renforcer la rente des géants du numérique, l’Europe se place selon elle dans une posture de client servile. Issue d'une sission avec l'AF dans les années 1970, la NAR critique également le mépris de la Commission pour les enjeux écologiques, budgétaires et industriels, et appelle à bloquer purement et simplement ce qu’elle qualifie également d’« accord de vassalisation ».
Le Groupe d’Action royaliste (GAR), plus discret mais tout aussi offensif, emploie une rhétorique plus militante encore, qualifiant le traité d’« accord de la honte ». Le GAR accuse frontalement Ursula von der Leyen d’avoir sacrifié les intérêts européens — et en particulier français — sur l’autel du seul intérêt allemand. Il met en garde contre les conséquences industrielles et sociales de ce pacte : selon lui, plus de 1 500 entreprises françaises pourraient être mises en péril. Le groupe insiste également sur la perte d’autonomie militaire qu’implique l’engagement européen à acheter massivement de l’armement américain, soulignant la disparition progressive de toute capacité stratégique propre au continent.
Malgré des différences idéologiques et historiques, ces trois courants convergent sur un point fondamental : l’Union européenne, loin d’être un rempart protecteur, s’est révélée être un instrument de soumission économique et géopolitique. Et dans ce constat commun, chacun réaffirme à sa manière la nécessité urgente d’un retour à une souveraineté politique incarnée — et pourquoi pas, demain, restaurée.
Une parole libre… mais marginalisée ?
Ces prises de position partagent un constat : celui d’une perte totale de contrôle des peuples européens sur leur destin économique et stratégique. Et dans un paysage politique où l’opposition classique se contente de communiqués indignés — Le Premier ministre François Bayrou a évoqué un « jour sombre » —, les royalistes se distinguent par leur radicalité et leur clarté.
S’ils restent minoritaires, ces mouvements ne sont plus invisibles. L’Action française, qui connaît une nouvelle jeunesse dans les milieux étudiants où elle exerce une forte influence, bénéficie d’une implantation active dans plusieurs grandes villes universitaires. La Nouvelle Action royaliste, quant à elle, participe régulièrement aux débats intellectuels par des tribunes remarquées dans Le FigaroVox, Marianne ou France Culture, après près de deux décennies de militantisme politique. Le Groupe d’Action royaliste reste très actif sur les réseaux sociaux et porte le combat écologique des royalistes . Leur audience est encore certes limitée, mais leur lucidité sur les enjeux de souveraineté économique est aujourd’hui partagée bien au-delà de leurs cercles. Ils posent une question simple : à quoi bon une « Europe-puissance » si elle ne défend ni ses travailleurs, ni ses industries, ni son modèle.
Et les prétendants au trône dans tout cela ?
Leur silence est étonnant. Ni le prince Louis de Bourbon, chef de la Maison de Bourbon, ni le prince Jean d’Orléans, chef de la Maison royale de France n’ont jugé utile de prendre la parole sur ce sujet. Pourtant, un souverain est justement le garant de l’indépendance de la nation, le protecteur du bien commun, l’incarnation d’une politique au-dessus des intérêts partisans et transnationaux ?
Cet accord commercial, présenté comme un compromis « nécessaire » par Bruxelles, a révélé une fracture bien plus profonde : entre les peuples et leurs élites, entre les intérêts français et les intérêts de l’Empire européen, entre les discours sur la souveraineté et leur application réelle. Les mouvements royalistes, par leur radicalité, posent les bonnes questions. Mais ils ne pourront peser davantage sans que ceux qui aspirent à incarner la monarchie de demain sortent du silence. Dans cette époque confuse, il ne suffit plus d’incarner l’histoire, encore faut-il s’engager dans le présent.
Dans un moment aussi symbolique de soumission géopolitique et d’érosion démocratique, l'abscence de prise de parole des deux prétendants au trône sur ce qui touche les questions nationales a interrogé sur les réseaux sociaux, a agacé même. Incarnant une vision alternative de la France, le comte de Paris comme le duc d'Anjou ont préféré laissé à des groupes militants le soin de défendre les fondements de l’État afin de garder leur principe de neutralité qui sied à leur charge tout en se réservant le droit d'intervenir ulétrieurement si la situation politique de la France se détériorait à court terme.
L'appel d'un collectif à bloquer le pays, dès le 10 septembre prochain, pourrait bien leur permettre d'intervenir et de saisir l'occasion pour se faire entendre des Français. Une prise de position qui s'était fâite entendre lors du mouvement des gilets jaunes entre 2018 et 2019 avec un certain écho qui reste à répéter.
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