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La loi de succession au trône d'Espagne pourrait être modifiée

En 2023, la Constitution espagnole continue toujours de privilégier les hommes au détriment des femmes pour l’accession au trône. Si Felipe VI n’a eu que des filles et qu’il est acquis que l'Infante Léonor de Bourbon sera la prochaine souveraine d’Espagne, certaines voix exigent une réforme de la loi de succession afin de garantir le principe d’égalité des sexes. « Un processus qui pourrait prendre six mois et qui pourrait ouvrir un débat sur l’avenir de la monarchie » s’inquiète José Antonio Zarzalejos, journaliste et spécialiste reconnu de la maison royale.  

 l’approche de la majorité de l’infante Léonor de Bourbon, une réforme de la loi de succession pourrait être envisagée par le Parlement et pourrait abroger un article de la Constitution de 1978 qui donne une priorité sur le trône aux hommes, quand bien même ceux-ci ne seraient que des cadets. C’est ainsi que le roi Felipe VI a pu être désigné héritier au détriment de ses deux sœurs aînées, les infantes Elena et Cristina, à sa naissance en 1968. Pour diverses associations et mouvements politiques, il s’agit désormais de mettre fin à ce qu’ils considèrent comme une discrimination au regard de la loi sur l’égalité des sexes. 

Une loi de succession ambiguë 

Si la position de l’infante Léonor, princesse des Asturies, n’est actuellement pas remise en question, bien que diverses mouvances s’inquiètent de voir une femme diriger l’État tant le souvenir du règne d’Isabelle II (1833-1868) a été le symbole de chaos politique et craignent que son futur mari (dont le rôle reste encore à déterminer) prenne de l’ascendant sur elle, personne en Espagne ne comprendrait qu’elle soit contrainte à renoncer en faveur d’un de ses cousins. « Si changement de la Constitution doit avoir lieu, il doit intervenir avant son mariage » indique José Antonio Zarzalejos, auteur du livre « Felipe VI, un roi face à l’adversité », paru en 2021, interrogé à ce propos dans l'Expresso.  Pour autant, rien n’est gagné pour les partisans de cette réforme dont la majorité se trouve à gauche des Cortès (Parlement). Une modification de la loi de succession entraïnerait un changement de constitution, obligeant à la dissolution du parlement, des échanges enflammés et une loi soumise au vote populaire. C’est tout l’avenir de la monarchie qui pourrait être remis en cause et accentuer les dissensions dynastiques déjà très présentes (la section 1 de l'article 57 possède une ambiguïté juridique puisque le terme mentionné de « successeurs » ne veut pas forcément dire « descendants » laissant donc toute possibilité à une autre branche Bourbon d’accéder au trône). 

Une institution soutenue mais qui reste fragile

Premier ministre socialiste (2004-2011), José Luis Rodriguez Zapatero avait vainement tenté de pousser le Parlement à voter de tels changements avant d’y renoncer. « Partant du principe qu’elle doit être approuvée par référendum, tôt ou tard, l'Espagne sera confrontée à un débat monarchie/république », estime cet ancien directeur du quotidien monarchiste ABC, considéré comme l'un des plus grands connaisseurs de la famille royale espagnole. « Cela générera des discussions qui se transformeront, finalement, non pas en un débat sur l'amendement du titre II [de la Constitution], mais en un débat sur le fait de conserver la monarchie ou non » prévient José Antonio Zarzalejos lors d'une récente réunion avec des journalistes étrangers accrédités en Espagne. Il tient pourtant à rassurer : « Tant que les deux grands partis nationaux, le Parti populaire et le Parti socialiste (PP et PSOE-ndlr), ne remettent pas en cause la monarchie, il y a peu de chances qu’elle soit abolie » affirme-t-il, précisant que l’idée républicaine reste encore minoritaire dans le pays (si on excepte le cas catalan) et que les Espagnols restent attachés à la monarchie parlementaire pour des « raisons historiques et de tradition ». « Elle tire sa légitimité de la Constitution » rappelle t-il, même s’il reconnaît que l’enthousiasme pour cette idée s’est nettement réduit depuis le début du siècle dernier et sous le régime franquiste. « Les deux Républiques n’ont pas laissé un souvenir grandiloquent dans la tête des Espagnols et ce système n’a pas vraiment d’avenir dans le pays, proche ou lointain » selon lui. 

Un débat qui dépend des procahines élections législatives

Monarchiste assumé, José Antonio Zarzalejos n’est pas moins conscient des dangers qui planent au-dessus de l’institution royale, minée par des scandales. « La société espagnole s’‘est sentie trahie par le roi Juan Carlos qui a abdiqué en 2014, impliqué dans des soupçons de corruption et dont les affaires extra-conjugales ont mis à mal l’image d’époux fidèle qu’il incarnait. Heureusement, il y a eu une adhésion progressive autour de la figure de Felipe VI qui demeure très populaire », mais à qui il manque toutefois « la capacité de renforcer le poids de la couronne en tant qu'institution », explique-t-il, évoquant à demi-mot sa facilité à céder aux pressions parlementaires. Léonor de Bourbon aura 18 ans le 31 octobre prochain et devra se rendre aux Cortès espagnoles pour jurer fidélité à la Constitution et allégeance au roi. Rien cependant n’indique qu’elle sera en mesure de le faire alors que l’Espagne se dirige vers de nouvelles élections législatives qui vont contraindre le monarque à dissoudre les Cortès à cette même date. Un débat qui pourrait donc se mettre en place sous la nouvelle législature à venir ou être reléguée aux oubliettes si la droite (Parti Populaire) et l’extrême-droite (Vox), premiers soutiens de la monarchie, s’assurent une majorité confortable.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 14/02/2023

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