« Je suis convaincu que connaître le passé sans désir de vengeance ne peut que nous aider à construire une meilleure vision de l'avenir et à être fiers de nos racines ». Ancien monarque et Premier ministre de Bulgarie, Siméon II vient de remporter une victoire décisive dans sa lutte contre le gouvernement dans la préservation des biens immobiliers de la maison royale des Saxe-Cobourg-Gotha. Hier, celui qui est encore regardé comme une alternative possible à la crise économique et politique qui secoue ce pays des Balkans a publié un communiqué où il appelle chacun de ses compatriotes à la « réconciliation historique ».
C’est une déclaration inattendue que vient de rendre publique Siméon II. Alors que la Cour suprême vient tout juste de confirmer que le palais de Tsarka Bistrica appartenait bien à l’ancien Tsar de Bulgarie et sa sœur, la princesse Marie-Louise, le fils de Boris III a décidé de confirmer définitivement la gratuité d’une partie du parc du palais de Vrana à la municipalité de Sofia et de rassembler sous son toit tout le patrimoine monarchique, politique et dynastique de sa famille afin que les Bulgares puissent se le réappropier dans son intégralité. Dans un communiqué publié sur son site officiel et les réseaux sociaux, Siméon II a expliqué les motivations qui l’ont poussé à prendre cette décision, notamment par la volonté de « préserver, d'étudier et de restaurer un trésor national et européen, dispersé à cause des vicissitudes de l'histoire ».
« Après de nombreuses années d'indifférence, de mensonges et de propagande, ma famille et moi avons décidé qu'il serait dommage d'oublier un patrimoine historique aussi riche que le nôtre- archives, peintures de famille et objets, étant donné qu'ils peuvent être rendus publics. Nous avons pris cette tâche à cœur en essayant de réunir en Bulgarie nos objets, archives et documents historiques ». En octobre 2010, le roi Siméon II a décidé de mettre en place le « Fonds pour la préservation du patrimoine historique Tsar Boris et Reine Jeanne », visant à préserver le patrimoine royal de Bulgarie avec les fonds dont il disposait. Il a alors entamé une réhabilitation du palais de Vrana, sa résidence principale située dans la capitale bulgare. Construit en 1898 par son grand-père, Ferdinand Ier, le palais a vécu tous les soubresauts de l’histoire mouvementée bulgare et les affres de la Seconde guerre mondiale, partiellement endommagé lors de bombardements. Avec le régime communiste, Vrana est devenu la résidence du Premier ministre marxiste Gregori Dimitrov qui a fait vider la résidence royale des restes de Boris III. Il a fallu le retour du souverain et son accession au gouvernement (2001-2005) pour que sa famille récupère le palais. En dépit de la tentative de remise en cause tardive par le premier ministre Boïko Borissov. «Mon objectif est de développer et de socialiser cet institut historique, dédié au troisième royaume bulgare, avec une exposition permanente, un fonds d'archives et une bibliothèque spécialisée - un lieu de science et de connaissance pour cette période, qui n'existe pas dans notre pays » explique Siméon II. «Malheureusement, tout cette période a été supprimée des manuels d'histoire et, au mieux, noircie» déplore le monarque.
«En 2006, j'ai fait don à l'Agence des archives d'État, des archives personnelles du roi Ferdinand, que j'avais déposées dans les années 1970 à la Hoover Institution de l'Université de Stanford, en Californie, avec une clause : au cas où la démocratie serait rétablie en Bulgarie, les archives devaient être restituées au pays » poursuit le monarque. « Les archives de mon grand-père comptent des dizaines de milliers de pages de contrats, d'accords et de négociations signées entre la Bulgarie et d'autres pays, sa correspondance avec les dirigeants de son temps, des photographies et plus encore. Actuellement, la Fondation Tsar Boris et Reine Jeanne possède un nombre important de grands albums et un éventail de photographies provenant de mon grand-père et de mon père, ainsi que des familles Saxe-Cobourg, Savoie et Orléans, reflétant chacun la vie à cette époque lointaine, ainsi qu'un important fonds d'archives » explique encore Siméon II qui rappelle que le référendum de 1946, qui a aboli la monarchie, a été « truqué».
« Aujourd'hui je pense à la prochaine génération et à l'héritage spirituel que je leur laisse » dit Siméon, 83 ans. «Je suis convaincu que connaître le passé sans désir de vengeance ne peut que nous aider à construire une meilleure vision de l'avenir et à être fiers de nos racines. Parce qu'on ne peut pas savoir où nous allons si ne sait pas d'où nous venons » conclu l’ancien souverain qui appelle ses compatriotes désormais à « la réconciliation historique ».
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