Pour ses soixante ans, le double prétendant à la couronne austro-hongroise a décidé de suivre la tradition de son père qui, à chacun de ses anniversaires, saisissait cette occasion pour traiter de près des sujets d’actualité en lien avec les défis géostratégiques de l’Union européenne. En raison des restrictions liées à la pandémie de covid-19, c’est en « Live » que l’archiduc Karl de Habsbourg-Lorraine a dessiné les grandes lignes de sa pensée politique devant un aigle bicéphale à la fois stylisé et moderne. A la fois, le symbole d’une dynastie qui continue encore de fasciner et le protecteur de la chrétienté sur le vieux continent, le fils d’Otto de Habsbourg-Lorraine a plaidé pour la mise en place d’une véritable politique étrangère au sein de l’union européenne et un retour à l’état de droit avant de se livrer dans une interview sans tabous.
« Je voudrais poursuivre cette tradition ». L’archiduc Karl de Habsbourg-Lorraine a souhaité s’inscrire dans les pas de son père qui profitait de sa date d’anniversaire pour s’adresser à ses compatriotes et aux européens. Héritier d’un empire qui a mêlé son destin à celui du vieux continent durant près de huit cents ans, le petit-fils de l’empereur Charles a organisé le 11 janvier un « Live », crise de coronavirus et restrictions sanitaires obligent. « Un grand anniversaire ne doit pas être simplement une raison de célébrer sa naissance, surtout si c'est une année ronde, mais il est aussi important de profiter de l’occasion pour faire un examen critique de la situation qui prévaut actuellement » en Europe a déclaré le prétendant au trône austro-hongrois en début de lecture de « Son Discours sur l'avenir de l'Europe». « La liberté et l’état de droit font partie des principes fondamentaux de l’Europe et à ce titre doivent être respectés » Des premières minutes de son discours, celui qui est président du Mouvement paneuropéen autrichien s’est inquiété de l’impact de la pandémie sur la politique européenne alors que « les défis géopolitiques que l’Europe doit affronter sont de plus en plus nombreux » rappelle Karl de Habsbourg-Lorraine. « Nous avons besoin d'une politique étrangère européenne cohérente formée à travers un noyau commun qui préciserait les compétences de chacun (…) et qui répondrait également à toutes les exigences de subsidiarité » chères au prince impérial. «« De mon point de vue, trois étapes sont nécessaires pour désendetter la zone euro et permettre le renouveau d’un système économique sain. Trois étapes qui signifient qu’elles soient réellement mises en œuvre en tant que concept global. Premièrement, la Banque Centrale Européenne devrait inscrire la dette souveraine des pays de la zone euro à son bilan. Deuxièmement, il devrait permettre aux citoyens de la zone euro d'effectuer des dépôts bancaires sécurisés grâce à une couverture provenant de la banque centrale et créer un euro numérique qui deviendrait une que monnaie souveraine. Et troisièmement, l'admission de monnaies privées concurrentes permettant de générer une stabilisation de l'euro grâce à la possibilité d’échanges interbancaires » affirme l’ancien député européen qui réclame « des mesures très spécifiques qui doivent être préparées afin de réduire la dette de la zone euro ».
Rejoint par le commissaire européen Johannes Hahn, l'ancienne ministre bulgare de l'Europe Gergana Passy (également présidente de l'Union paneuropéenne bulgare) et l'ancien Premier ministre des Pays-Bas, Jan Balkenende qui ont délivré des messages de soutien à l’archiduc, Karl de Habsbourg-Lorraine a également accordé de nombreux entretiens à la presse autrichienne. « Il y a des gens qui disent que l'histoire de ma famille a apporté beaucoup de choses positives et que ces choses positives devraient également être mises en exergue dans le présent. Bien sûr, il y a aussi de purs nostalgiques parmi eux, mais on ne peut nier qu’il y a ceux qui pensent exactement le contraire, qui nient et calomnient tout ce qui est lié à notre histoire ». Karl de Habsbourg- Lorraine est lucide. Il sait que son nom fascine autant qu’il est synonyme de rejet pour une partie des autrichiens, « ces républicains qui se sont installés dans les châteaux de sa famille », et qui s’amuse de ces partis politiques qui font la chasse à sa particule. « C’est aussi mesquin que je trouve cela marrant. Je regarde cette attention avec beaucoup de légèreté » s’amuse le prétendant au trône. Il ne souhaite pas regarder le passé, d’ailleurs il n’a toujours pas vu les films « Sissi » et préfère associer son nom à celui de la construction et l’élargissement de l’Europe, loin de tout ce « kitsch ostentatoire en forme d’opérette ».
Loin des valses de Vienne, c’est un passionné de politique, engagé comme le montre son discours. « Je suis certainement conservateur en termes de valeurs, mais certainement pas conservateur en terme de comportement. Et personne ne peut m'en vouloir à ce titre. Je ne suis ni à gauche ni à droite » précise le prince qui s’affiche profondément catholique. Au choc des civilisations, le prince parle de « cette perte des valeurs » qui permet l’émergence des extrêmes religieux. Il se déclare contre l’euthanasie, l’avortement, regrette que la protection de la vie, qu’il place sur un piédestal, soit sans cesse remise en cause par un progressisme que l’on impose comme une vérité établie. Il définit son rôle comme un lien entre le passé et le présent. « L’important c’est de préserver sa propre identité » précise l’archiduc. « Si vous ne savez pas d'où vous venez, vous ne savez pas où vous allez et ne savez pas où vous êtes. Vous ne pouvez-vous situer que si vous avez une connaissance de l'histoire. Il se peut que notre famille joue encore un rôle demain » croit fermement le prince Karl de Habsbourg-Lorraine. Il y a peu, son nom a été évoqué comme possible président de l’union européenne. De quoi nourrir tous les fantasmes d’un retour à l’empire austro-hongrois sous les couleurs bleues et jaunes étoilées de l’Europe.
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