«Nous ferons tout pour protéger la monarchie !»

«Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger la monarchie». La Thaïlande va-t-elle basculer dans la guerre civile entre ultra-royalistes, monarchistes constitutionnalistes et républicains ?  C’est la question que se pose désormais la presse depuis hier. Alors que l’ancien Siam fêtait le 68ème anniversaire du roi Rama X, d’importants rassemblements ont eu lieu aux abords du palais royal. Les manifestants n’ont pas hésité à réclamer la fin de la monarchie tandis que d’autres demandaient le retour de la monarchie constitutionnelle.  Hier un tant soi peu ironique face à la situation, le Premier ministre Prayut Chan-o-cha a ordonné à l’armée et à la police de se tenir prêtes à intervenir afin d’éviter de revivre les événements qui ont conduits chemises rouges (pro-démocraties) et chemises jaunes (ultra-royalistes) à se battre dans la capitale thaïlandaise.  Les partisans du roi menacent désormais de chasser  les opposants à la monarchie de Bangkok. Une atmosphère de révolution française plane sur la capitale thaïlandaise.

Ses nombreuses frasques, son comportement durant la crise du Covid-19 avaient été largement critiqués par ses sujets et sa passivité face à la pandémie, largement moquée par les médias internationaux qui ne s'éraient pas privés pour faire de la surenchère sur le sujet. Face aux nombreuses processions religieuses organisées pour son anniversaire, entrecoupées de serments de loyauté imposés aux membres du gouvernement, le roi a dû faire face à d’importants rassemblements aux abords du palais. Pour la première fois, les manifestants ont réclamé la fin de la monarchie, ce 28 juillet. Pancartes et banderoles, largement hostiles au monarque, ont été déployées par les mouvements pro-démocraties qui réclament la dissolution immédiate du gouvernement. «Perdre la foi n’est pas un crime» peut-on lire sur certaines d’entre elles, en référence à une affaire qui a indigné les thaïlandais et déclenché des tollés. Arrêté pour avoir porté un tee-shirt où il était inscrit qu’il avait perdu confiance dans la monarchie, Tiwagorn Withiton., militant au sein d'une association de défense des droits de l’homme été immédiatement interné en hôpital psychiatrique pour ce crime de lèse-majesté. Selon le rapport d’accusation, pour avoir refusé de stopper de le porter, les médecins qui l’avaient examiné, avaient conclu que le «criminel» était fou. Pour l'activiste en exil Junya Yimprasert qui a organisé une manifestation anti-monarchique en Allemagne et érigé une guillotine symbolique devant la porte de Brandebourg, à Berlin,, il est temps d’envoyer le roi «à la cour pénale internationale». « Notre objectif est d’abolir la monarchie» affirme ce quinquagénaire qui a projeté des illustrations comiques mettant en vedette Rama X sur les murs du parlement allemand et la maison de la chancelière Angela Merkel.

Faisant fi de ces manifestations, les ultra-royalistes ont continué à célébrer l’anniversaire de Rama X en toute quiétude. «Nous jurons solennellement que nous ferons du bon travail et serons la force du pays. Nous suivrons les traces de Sa Majesté pour résoudre les problèmes de la nation et du peuple» a déclaré le Premier ministre Prayuth Chan-ocha sur la place Sanam Luang en face de 69 moines bouddhistes. Mais moins imperturbable qu’il n’y paraît, l’ancien putschiste de 2014 qui a mis fin au pouvoir du clan Shinawatra (lequel a donné deux premiers ministres suspectés de vouloir rogner les pouvoirs du roi de Thaïlande et renversés) a convoqué son état-major.  «J’ai ordonné à la police royale de tous les séparer afin d’éviter un affrontement qui va les jeter les uns contre les autres» a déclaré le premier ministre qui craint que la capitale ne soit le centre d’affrontements entre pro-démocraties, divisés entre républicains et constitutionnalistes, et les ultra-royalistes. En effet, loin d’être silencieux, les partisans du roi se sont rassemblés au sein d’un mouvement qui ne cache pas son intention de chasser les pro-démocraties de la capitale. Prayuth Chan-ocha a averti : «comme je crains que cela ne dégénère et nous ramène au à revoir des événements fâcheux je demande par conséquent aux étudiants de rester chez .  Avant d’étendre jusqu’à la fin du mois le décret d’urgence qui permet au gouvernement de diriger le pays sans passer par le parlement, qui lui est pourtant largement acquis.

Dans un message publié sur Facebook, l'organisateur de la contre-manifestation a déclaré que «leur rassemblement n'était pas une manifestation, mais un acte symbolique afin de défendre l’institution royale». «Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger la monarchie», a renchéri le leader de ce mouvement qui refuse de dévoiler son nom (des rumeurs affirment que ce serait Suthep Thaugsuban, ancien vice premier ministre entre 2008 et 2011) mais dont les militants appellent, soit à faire la chasse aux anti-monarchistes  où qu’ils se trouvent », soit  les entreprises à renvoyer de leurs postes tous ceux qui refusent de s’agenouiller devant le roi. «Après avoir lu un serment de fidélité au roi, nous chanterons l'hymne royal ensemble». La manifestation a été autorisée et fait craindre le pire. «Premièrement, des volontaires devraient tranquillement s'infiltrer et prendre des photos de ces personnes qui ont rejoint les lieux de protestations», a martelé sur les réseaux sociaux Rienthong Nanna, un physicien propriétaire d’un hôpital, lui-même à la tête d’un mouvement ultra-royaliste. «Essayez de vous assurer que les photos donnent des visages détaillés afin que leurs identités puissent être tracées», a-t-il conseillé à ses partisans. Loin de tout, le roi Rama X semble ne pas s’inquiéter de la situation révolutionnaire qui prévaut dans le royaume. D’ailleurs,avec l’assurance que rien ne peut lui arriver et l'armée derrière lui, il n’a pas daigné assister aux pompeuses et coûteuses festivités organisées en son honneur. En Thaïlande, le roi danse alors que la colère gronde de plus en plus ! Jusqu'à quand  ? 

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