« Je jure de défendre la monarchie, le roi et la nation ! »

Manifestation royaliste thailande« Je promets de me battre côte à côte avec des frères et sœurs qui partagent les mêmes convictions afin de protéger l'institution bien-aimée» a déclaré un des orateurs, Patiyut Tongpajong, aux militants ultra-royalistes. Ce dimanche 30 août, ils se sont rassemblés afin de montrer leur soutien au roi Maha Vajiralongkorn. Plus d’un millier de thaïlandais ont répondu à l’appel de l’ancien député du Parti démocrate, Warong Dechgitvigrom. Tous vêtus de blanc ou de jaune, le leader du parti « Thai Pakdee » (Thaïlandais loyaux) les a exhorté à protéger « la monarchie, le cœur de la nation » face à ceux « qui insultent le régime et qui font preuve d’un esprit antipatriote ».

Warong dechgitvigromAlors que les manifestations estudiantines continuent en dépit de l’arrestation des divers leaders de la contestation, les fidèles de la monarchie ont décidé de faire entendre à leur tour leurs voix. Rassemblés dans un stade de la capitale du royaume de Thaïlande, Bangkok, 1200 personnes ont répondu à l’appel du parti « Thai Pakdee » (Thaïlandais loyaux). Fondé il y a quelques semaines par Warong Dechgitvigrom, ce dernier a expliqué lors du baptême inaugural de ce mouvement ultra-royaliste qu’il était nécessaire de « protéger la monarchie contre tout harcèlement ». L’ancien député du Parti démocrate refuse toute modification de la constitution actuelle, rejette toute demande de dissolution du parlement ou toute réforme de la monarchie. Pour Warong Dechgitvigrom, ceux qui osent manifester contre le roi Maha Vajiralongkorn sont uniquement animés d’un esprit antipatriotique, balayant l’idée que le gouvernement ait supprimé la démocratie dans le royaume. « L’objectif de notre groupe est de protéger la monarchie » martèle Warong Dechgitvigrom.

Tagreuters ultra royaliste thailandaisLe stade n’est pas rempli mais ils étaient tous vêtus de tee-shirts blancs sur lequel est dessiné un cœur tricolore ou de jaune, la couleur de la royauté tricentenaire. « L'institution monarchique n'a aucun rôle dans le gouvernement du pays. L'institution est le soutien moral qui relie les gens ensemble » déclare le leader du parti « Thai Pakdee » qui s’agace des accusations proférées par les manifestants. Des étudiants qui remettent en cause la monarchie, un crime passible de 15 ans d’emprisonnement et qui appellent à une réforme profonde du régime comme le départ du premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, auteur du coup d’état qui a amené les militaires au pouvoir en 2014.  Une fronde populaire encore impensable il y a deux ans.  « Sauver la nation », « Stop au harcèlement des loyalistes », « Longue vie au roi » ou encore « Renverser l’institution — sur mon cadavre » sont autant de slogans qui s’affichent sur les bandanas ou sur des pancartes des militants du mouvement ultra-royaliste qui entendent montrer leur fidélité ou leur amour pour le roi Rama X, son nom de règne, ou même son père révéré, décédé en 2016.

Portrait du roi Rama X à BangkokDrapeaux thaïlandais au vent, des écrans géants diffusent des vidéos montrant les violentes dispersions des manifestations d’octobre 1976 par les militaires. Sur les mêmes lieux de la contestation actuelle, à l’université de Thammasat, craignant un soulèvement communiste alors que les étudiants manifestaient aux côtés de milliers de citoyens, l’armée était intervenue avec l’aide d’unités paramilitaires royalistes. Un vrai massacre. Qui avait coûté la vie à plus de 100 personnes. Une ovation s’est faîte entendre à la vue de ces images d’archives. «Je promets de me battre côte à côte avec des frères et sœurs qui partagent les mêmes convictions afin de protéger l'institution bien-aimée», a déclaré un des orateurs, Patiyut Tongpajong, aux militants ultra-royalistes. « Je m'en fiche si vous parlez de politique. Vous pouvez protester contre le gouvernement - allez-y et faites-le. Mais ne touchez pas à la monarchie » dit Somporn Suklert, retraitée. «Nous ne pouvons pas laisser cela se produire. C'est pourquoi nous sommes si nombreux à être sortis aujourd'hui et vous en verrez plus » affirme Samacha Sinlapakob, un employé de bureau de 39 ans, qui pleure en parlant de la situation actuelle dans laquelle se trouve le royaume. «Les groupes critiquent et diffament la monarchie et diffusent de la désinformation avec des faits sans fondement. Il est clair qu'ils attaquent la plus haute institution du pays» surenchérit-il. Le mouvement a appelé le ministère de l'Éducation à fermer les espaces de protestation organisés sur les campus afin d’empêcher tous les universitaires qui pourraient être opposés à la monarchie « de laver le cerveau des étudiants ». Warong Dechgitvigrom n’a d’ailleurs pas hésité à dire publiquement que son parti fournirait un soutien juridique à toute personne harcelée par des militants anti-monarchies. Et de réclamer l’extradition de Pavin Chachavalpongpun, un professeur d’université officiant au Japon, recherché pour crime de lèse-majesté et auteur d’une page Facebook (fermée puis réouverte) qui rassemble presque un demi-million de personnes.

« Je jure de défendre la monarchie, le roi et la nation ! » ont crié, d'une seule et même voix à la fin du meeting, les partisans de la monarchie. Au cours des 15 dernières années, la polarisation politique a conduit à des affrontements de rue entre partisans des différents partis présents au parlement. Les mouvements se radicalisent de part et d’autres au fur et à mesure que le gouvernement réprime les manifestations. Y compris sur les réseaux sociaux, fermant toutes les pages qui critiquent le roi. Les craintes de voir le pays sombrer dans une guerre civile se sont de plus en plus fortes. Un chaos dont ne pourrait pas se relever la monarchie qui continue toujours de la faire la sourde oreille aux demandes aux étudiants. Avec un souverain qui refuse d’intervenir laissant tout pouvoir à l’élite militaire, bouclier incontournable de la dynastie Chakri. 

Copyright@Frederic de Natal

 

Date de dernière mise à jour : 01/09/2020

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