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Les Népalais réclament le retour du roi Gyanendra Shah

Des milliers de personnes ont envahi la capitale du Népal, Katmandou, afin d’exiger la restauration de la monarchie constitutionnelle et la mise en place d’un État exclusivement hindou. Face à l’ampleur de la manifestation, la police est violemment intervenue afin de la disperser et empêcher une prise du pouvoir. La seconde tentative en six mois.

Le 9 avril 2024, le mouvement nationaliste Rastriya Prajatantra Party (RPP) a surpris le gouvernement de la République fédérale du Népal en organisant une manifestation en faveur du retour de la monarchie, rassemblant des dizaines de milliers de manifestants à Katmandou.

Une manifestation qui suprend par son ampleur

Surpris par son ampleur alors les manifestants menaçaient de pénétrer dans le centre de la capitale népalais, les forces de l’ordre sont violemment intervenues. 7000 policiers, dont la Force opérationnelle spéciale (STF) de la police népalaise et la Force de police armée (APF), se sont déployés, ont utilisé des gaz lacrymogènes et des puissants canons à eau pour disperser les manifestants, blessant plusieurs dizaines de royalistes. Plusieurs médias locaux, confirmé à l’AFP par le porte-parole de la police, Nawaraj Adhikari, ont rapporté que les partisans de la monarchie auraient tenté de se diriger vers le temple Bhadrakali où se situe le Quartier général de l'armée en dépit de l’interdiction mise en place depuis plusieurs mois par le gouvernement d’extrême-gauche au pouvoir. 

 

 

Les royalistes népalais, une puissance politique 

Cette manifestation intervient dans un contexte de tensions politiques qui ne cessent de s’accroitre depuis plusieurs mois dans la pays des neiges éternelles en raison de l'instabilité politique, d'une corruption qui grangrène le pays et d’un développement économique en berne. Le 23 novembre 2023, une manifestation similaire avait également dégénéré en tentative de coup d’Etat afin de rétablir la monarchie. Menée par Durga Prasa, un homme d’affaires reconnu dans le secteur médical, qui avait rassemblé sous son nom plusieurs organisations nationalistes et monarchistes, le gouvernement avait promptement réagi, fait arrêter de nombreux royalistes, mis son leader en résidence surveillée, accusé de détournements de fonds par les maoïstes. En mars dernier, le RPP avait soumis mémorandum de 40 points au Premier ministre Pushpa Kamal Dahal, exigeant le retour de l’institution royale que ce révolutionnaire a renversé en 2008, le menaçant d’actions dans la rue si celui-ci n’obtempérait pas rapidement. 

Un pays qui regrette sa monarchie

"La constitution de notre nation doit être modifiée, c'est l'une des principales revendications du Rastriya Prajatantra Party (RPP). Nous souhaitons  faire du Népal un État hindou et rétablir la monarchie... c'est la seule voie viable pour sauver notre nation qui sombre. Sinon, la nation continuera de s’enfoncer de plus en plus dans une situation intenable. La population ne peut plus rester passive face à cette situation et cela incite les gens à descendre dans la rue aux côtés du parti Rastriya Prajatantra qui est en première ligne de cette lutte.", explique Aang Chiring Lama, l'un des manifestants, à l'Asian News International (ANI). "On nous a dit que la monarchie, le royaume hindou, était la cause du retard du Népal dans le progrès économique. Mais après tout ce temps, nous ne voyons pas la prospérité que nous attendions. C'est pourquoi nous sommes convaincus que le Népal a besoin d'une monarchie constitutionnelle, qu'il doit redevenir un royaume hindou. C'est pourquoi nous sommes ici réunis. De plus, nous avons soumis un mémorandum au Premier ministre du Népal il y a un mois, il n'a pas été pris en compte ni reconnu par le gouvernement.", déclare de son côté Kalyan Bikram Acharya, l'un des jeunes manifestants royalistes. « "Pour sauver notre identité et notre culture, il n'y a pas d'autre moyen que de restaurer la monarchie.", ajoute même Tanka Prasad Khatiwada, 80 ans, venu de l'est du Népal pour rejoindre la manifestation.

Un monarque qui jouit à nouveau d'une forte popularité

Depuis plusieurs semaines, le roi Gyanendra Shah, 76 ans, effectue une tournée dans tout le pays, largement acclamé par les Népalais qui se déplacent en masse à toutes ses prises de parole où il ne cache pas son hostilité au gouvernement actuel. Largement médiatisé, il s’est également fendu de plusieurs communiqués qui ont mis en émoi le gouvernent d’extrême-gauche. Plusieurs voix, dans le camp marxiste notamment se sont élevées afin de réclamer son arrestation et son emprisonnement. Déjà souverain de 1950 à 1951, Gyanendra Shah est remonté sur le trône en 2001 après l'assassinat de la famille royale par le prince héritier, Dipendra Shah. Très rapidement, il affiche sa volonté renouer avec l’exercice absolutiste de la monarchie. Une révolution cinq ans plus tard va le contraindre à remettre en vigueur la constitution en vigueur depuis les années quatre-vingt-dix. Une décision qui précipité la monarchie vers sa chute en 2008 après que le principal soutien de la royauté, le Congrès Népalais, se soit entendu avec la rébellion marxiste Pushpa Kamal Dahal. Un accord qui a également à une longue guerre civile qui a fait plus de 16000 morts en une décennie. 

Vote des différents mouvements monarchistes au Népal @wikicommons

Le Rastriya Prajatantra Party, faiseur de rois

Outre le rétablissement de la monarchie constitutionnelle en tant que "gardienne de l'État", le parti demande la suppression des structures provinciales et le maintien de seulement deux niveaux de gouvernement – central et local, l’interdiction de toutes les autres religions (les chrétiens sont régulièrement accusés de prosélytisme sur le territoire et objet d’exactions par les Hindous), une enquête sur les éventuels détournements de fond par des parlementaires, le droit de vote pour les Népalais vivant à l'étranger, le strict respect de la politique étrangère de non-alignement (le pays est l’objet d’une lutte d’influence intense entre l’Inde [qui souhaite le retour du roi-ndlr] et la Chine [qui soutient le gouvernement marxiste-ndlr]). Le RPP, également le cinquième parti au Parlement (avec 14 /275 députés, 4/753 maires et 305/35011 conseillers municipaux), revient politiquement de loin.  Victimes de nombreuses scissions, les royalistes ont pourtant occupé à diverses reprises des postes au sein du gouvernement (2015, 2017 et 2022), noué des alliances avec les communistes (opposés aux marxistes), démontant leur capacité à faire trembler la République. C’est le roi Gyanendra qui a mis fin aux guerres d’égocentrisme en appelant les 3 principaux mouvements royalistes à fusionner et élire un nouvel encadrement qui a décidé d’accentuer sa pression sur le gouvernement marxiste. 

A la fin de la journée, les royalistes ont cessé leur démonstration de force sans pour autant stopper de revendiquer le retour du roi. Attendu le 14 avril prochain, la venue dans Katrmandou du roi Gyanendra Shah pourrait marquer un tournant dans la vie politique tumultueuse du Népal et permettre au monarque déchu de faire son retour.

Copyright@Frederic de Natal

 

Date de dernière mise à jour : 10/04/2024

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