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Génération Z : pression sur le gouvernement, confusion chez les monarchistes

Un mémorandum remis au gouvernement népalais par trois groupes monarchistes de la Génération Z relance la contestation : ils exigent la démission de la Première ministre intérimaire Sushila Karki, des élections et la restauration du roi Gyanendra Shah. Parallèlement, le mouvement royaliste peine toujours à s’unifier depuis l’abolition de la monarchie en 2008.

Le 19 novembre 2025, un mémorandum a été remis au Président de la République népalaise, Ram Chandra Poudel, par trois groupes de jeunes royalistes issus de la Génération Z. Ils réclament la démission de la Première ministre intérimaire Sushila Karki et l’émergence d’un nouvel exécutif. Derrière ce geste audacieux se profile une génération qui refuse l’immobilisme et conteste l’héritage politique post-monarchique.

Mais face à elle, les forces royalistes — bien qu’animées d’une même nostalgie du trône — restent toujours incapables de parler d’une seule voix en dépit de leur pouvoir de nuisance et de déstabilisation des institutions républicaines.

Un gouvernement né du chaos, fragilisé par l’urgence : une jeunesse qui ne veut plus attendre

Leur accusation est claire : le gouvernement intérimaire aurait trahi les attentes nées des manifestations massives des 8 et 9 septembre dernier qui ont fait chuté le gouvernement communiste. Ils dénoncent son inertie face aux scandales de corruption, son refus de réviser la Constitution pour permettre l’élection directe du Premier ministre, et surtout son incapacité à rendre justice aux victimes de la contestation. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 76 jeunes manifestants tués, des centaines blessés, des familles encore sans compensation. À cela s’ajoutent l’interdiction des réseaux sociaux lors du soulèvement, la répression brutale et le sentiment d'un État sourd aux doléances d’une jeunesse en éveil politique et qui ne veut plus d'une ancienne génération incapable de les écouter ou de les comprendre. 

Dans leur texte, ces groupes royalistes déclarent : « Le gouvernement issu de la révolte a ignoré toutes les attentes, laisse le pays sans cap. ». Un avertissement final plane comme une menace : si rien ne change, la rue pourrait à nouveau s’enflammer — pacifiquement mais avec détermination.

La Première ministre Sushila Karki, désignée pour conduire la transition après la chute de la coalition Congrès–UML, a misé sur la dissolution du Parlement et l’organisation d’élections le 5 mars 2026 afin de rétablir la stabilité du pays. Une stratégie jugée technique, mais insuffisante pour cette jeunesse qui assiste, dépitée, au même jeu des partis tel qu'il a été avant les manifestations. Excepté  le Congrès népalais (centre-droit) qui fait preuve d'unité (bien que divisé entre républicains et royalistes), depuis septembre, le pays vit en effet au rythme des recompositions des partis. La Gauche a pris l’avantage sur le terrain de l’union : les branches maoïstes et socialistes du Parti communiste népalais ont scellé leur fusion, immédiatement suivies par une douzaine de factions qui les ont rejoints. Dans la foulée, deux partis centristes — le Rastriya Swatantra Party et le Bibeksheel Sajha Party — ont également uni leurs forces.

Cette dynamique contraste douloureusement avec l’autre versant du paysage népalais.

 

 

Génération Z monarchiste : une vision radicale, une base dispersée

Abolie en 2008 après deux siècles d’histoire, la monarchie entretient toujours un écho puissant dans certaines franges de la population, en particulier chez les jeunes nationalistes qui y voient un repère identitaire. Pourtant, quinze ans après, le camp royaliste demeure morcelé, prisonnier de querelles internes et d’ambitions contradictoires. Lors des élections législatives, ils restent pourtant une force avec laquelle d’autres partis ont tenté de composer en les intégrant dans leur gouvernement avec des postes de premier plan.

Le signe le plus révélateur reste la manifestation du 28 mars 2025 à Katmandou — présentée comme le premier rassemblement unitaire depuis des années. Elle s’est soldée par un fiasco et une tentative de renversement des institutions marquée par un manque de leadership : violences, incendies, deux morts, puis un effondrement immédiat du mouvement. Depuis, les tentatives de fédération se succèdent, souvent dans l’enthousiasme, toujours dans la dislocation. Les slogans s’accordent mieux que les dirigeants.

L’Alliance Génération Z pour la Monarchie , qui s’est constituée à la suite de la chute du gouvernement communiste, se distingue par une clarté inédite de sa ligne, tranchant avec les partis monarchistes traditionnels : rétablissement d’une monarchie constitutionnelle, élection directe du Premier ministre, révision des traités jugés « inégaux », reconnaissance du Népal comme seul État hindou-bouddhiste (interdiction des autres religions), parité absolue dans les instances politiques, service national obligatoire pour les 18-24 ans, ect etc. Un programme ambitieux, nationaliste, structuré, presque révolutionnaire, qui s'est doté d'une pétition en ligne exigeant la mise en place d’un référendum sur la question monarchique.

Mais faute d’alliances solides, la proposition reste théorique. Aucun parti majeur royaliste n’a encore soutenu l’initiative, et les autorités n’ont formulé aucune réponse.  Pourtant, le Nepal ne manque pas de forces royalistes actives. Actuellement, le Parti national démocratique (Rastriya Prajantra Party-RPP), dirigé par l'ex-député Rajendra Lingden, le Parti national démocratique du Népal (Rastriya Prajantra Party-Nepal-RPP-N), dirigé par l'ancien vice-président Kamal Thapa, le Nagarik Bachau Dal, récemment créé et dont Durga Prasain (ancien leader de la manifestation du 28 mars) est le parrain, et l'Alliance de la Génération Z pour la monarchie figurent parmi les groupes militant pour la restauration de la monarchie. Récemment, un groupe dirigé par l'ancien ministre Keshar Bahadur Bista et le Congrès démocratique, dirigé par Bipin Koirala,ont appelé également à rétablir la monarchie hindoue. 

Le Népal se retrouve aujourd’hui face à une alternative historique : d’un côté, une jeunesse qui refuse la résignation, qui exige justice, réforme, souveraineté politique et qui, parfois, regarde vers la monarchie avec l’espoir d’une stabilité retrouvée ; de l’autre, un courant royaliste chargé d’un passé prestigieux, mais incapable de se constituer en force cohérente. Le 27 novembre, le RPP a fini par annoncer avoir nommé un comité composé des dirigeants du parti afin de promouvoir l'unité, les alliances et la coopération avec les partis, campagnes, groupes et individus partageant les mêmes idées. de retour à l'institution royale Un espoir semble se dessiner sous l’égide du roi Gyanendra Shah (une menace pour certains partis républicains), 78 ans,  qui les pilote afin de les unir tous sous sa bannière et potentiellement permettre au jeune prince héritier Hridayendra Shah , 23 ans, espoir de la Gen'Z, de monter sur le trône.

La contestation renaît, le pouvoir chancelle, les élections se rapprochent. Si la Génération Z transforme sa colère en structure politique, elle pourrait redessiner l’avenir du pays. Si les monarchistes continuent de s’éparpiller, ils resteront spectateurs d’un retour qui n’aura pas lieu et les perspectives de restauration de la monarchie s'éloigneront une nouvelle fois, laissant l'union de la Gauche et l'extrême-Gauche décider du destin du pays aux neiges éternelles.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 01/12/2025