Iehiro Tokugawa, nouveau daimyo d'un clan réputé de shoguns

C’est une dynastie de shoguns qui a longtemps dirigé le Japon avant de déposer les armes en 1869.  Ce puissant clan de daimyos descend directement de l’empereur Seiwa, un souverain qui a régné au IXe siècle. Fin décembre 2022, Iehiro Tokugawa est devenu le dix-neuvième chef de cette maison qui incarne encore toute l’histoire militaire et glorieuse du Soleil Levant.   

Le 29 décembre 2022, la bannière de la maison Tokugawa a été déployée au temple Zojo-Ji. Représentant trois feuilles vertes d'asaret à tige distincte (ou « triple rose trémière ») se faisant face en cercle, elle est encore le symbole de toute l’histoire passée et glorieuse du Japon. Jusqu’ici dirigée par Tsunetaka Tokugawa, 83 ans, ce dernier a décidé de renoncer à sa charge afin de la transmettre à son fils Iehiro Tokugawa. Une cérémonie qui a réuni plusieurs centaines de personnes, retransmise sur certains canaux de télévision, et même l’objet d’un traitement national.

Iehiro Tokugawa et son arrière-arrière-arrière-grand-père le dernier shogun de l empereur Meiji

Une maison héréditaire de shoguns, fierté nationale

Ce lieu sacré n’a pas été choisi au hasard. Situé à Tokyo, la capitale japonaise, il abrite aussi les cendres des shoguns de cette dynastie. C’est en 1603 que les daimyos de cette maison vont se hisser sur les plus hautes marches de l’empire, régnant quasiment sur le Soleil Levant en lieu et place des souverains devenus faibles. Après avoir éliminé tous leurs rivaux, ils font d’Edo (future Tokyo) la capitale de leur shogunat, un État dans l'État, réprimant tout soulèvement ou tentative d’indépendance des souverains. Il faudra attendre 1869 avant que l’autorité impériale ne soit restaurée. Partisans du shogun Yoshinobu Tokugawa (1837-1913) et ceux de l’empereur Meiji vont alors s’affronter durement lors de la guerre épique de Boshin que l’on peut voir dans le film « Le dernier samouraï », sorti sur grand écran en 2003 . Acculé par les forces impériales, Yoshinobu Tokugawa décide de déposer les armes et de se retirer afin de se consacrer à diverses passions comme la peinture à l'huile, le tir à l'arc, la chasse, la photographie ou encore le vélo. Reconnaissant et admiratif du guerrier qu’il aura toujours été, l’Empereur Meiji décida de l’élever au rang de prince en 1902. Des titres que portent encore, avec celui de duc, ses descendants actuels et dont le sang se mélange avec celui de la maison impériale du Japon.

Le shogunat @youtube/screenhot

Une histoire qui se poursuit encore, un nom en héritage

La maison Tokugawa a donné deux présidents à la Chambre des pairs (1903-1933 et 1946-1947). Depuis, soutien indéfectible à la monarchie divine, elle a quitté la sphère politique pour se consacrer exclusivement à la sauvegarde de ses différents trésors, véritable patrimoine national sur lequel cette famille veille jalousement. Iehiro Tokugawa, 58 ans, est désormais devenu le gardien de cette histoire qui fascine encore les Japonais. Diplômé de l’université Keio, il est parti faire ses études aux États-Unis où il a obtenu un master en économie. Il parle couramment l’anglais, ce qui lui a permis de traduire de nombreux livres et d’obtenir une certaine reconnaissance littéraire (on lui doit les sous-titres dans sa langue du film « Green Zone »). Membre libéral du Parti constitutionnel-démocrate (PCD), opposé au nucléaire et à tout dialogue avec la Corée du Nord, cet amateur de whisky a tenté une incursion en politique (2019) sans pouvoir se faire élire au poste de gouverneur et de député (malgré le soutien affiché d’autres descendants de familles issus du shogunat défunt). Dépité, Iehiro Tokugawa a fini par se retirer du PCD en proie à des dissensions internes. C’est au Vietnam qu’il a rencontré son épouse. Une mésalliance qui a créé quelques tensions au sein de sa famille avant que celle-ci ne finisse par accepter l’infortunée bru.  Le couple est sans enfants.

Cette année, la maison Tokugawa a été mise à l’honneur sur le petit grand. La série dramatique « Dou Suru Ieyasu » est sortie quelques jours après l'intronisation d'Iehiro Tokugawa. Consacrée au fondateur et personnage phare de la dynastie, Ieyasu Tokugawa, forte de 14 épisodes de 45 minutes chacun, elle a très rapidement conquis son public. Interrogé, le nouveau. Président de la Tokugawa Memorial Foundation a déclaré qu’il avait trouvé la série dramatique « très intéressante et très divertissante. Jun Matsumoto (l’acteur principal-ndlr) a l'image d'un Ieyasu très humain et jeune. Il a vécu une vie pleine d'émotions. Je pense que les gens de l’extérieur qui ne connaissent rien au Japon l’apprécieront à sa juste valeur ».

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 12/04/2023

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