Le mystère des couronnes disparues de Warri

Armoiries du royaume de WarriC’est un mystère qui alimente les pages de tous les médias nigérians depuis plusieurs jours. Mais où sont donc passées les deux couronnes des Olus (rois et reines) de Warri ? Depuis la mort du roi Ikenwoli Godfrey Emiko le 20 décembre 2020, ce royaume traditionnel et chrétien de l’Afrique de l’Ouest connaît une grave crise de succession qui a fait sortir le président de la République fédérale, Muhammadu Buhari, de sa réserve. L’affaire est loin d’être anodine puisque les troubles qui ont éclaté entre les deux factions rivales, menacent la paix civile au sein d'une ville située au cœur d’une des principales richesses du pays, l’or noir. Une enquête a été déclenchée afin de résoudre cette énigme qui pourrait bientôt connaître un heureux dénouement.

Ikenwoli Godfrey EmikoC’est une «affaire qui vient troubler la tranquillité de la ville de Warri, centre névralgique de l’industrie pétrolière du Nigéria». Dans son édition du 12 avril dernier, l’hebdomadaire bien connu « Jeune Afrique » a consacré un long article sur un mystère qui alimente tous les médias. Les deux couronnes du royaume de Warri ont disparu de la salle du trésor depuis plusieurs jours. Le 20 décembre 2020, le décès de l’Olu (roi) Ikenwoli Godfrey Emiko a provoqué une grave crise de succession au sein de cette monarchie traditionnelle située dans la région du Delta. Sans ces couronnes, impossible d’introniser celui qui a été choisi pour succéder au monarque défunt. Etat fondé au cours du XVème siècle, la monarchie de Warri a noué des liens avec les Portugais, qui offre les deux couronnes au souverain, et les espagnols du roi Philippe II qui entretient une correspondance avec l’Olu Sebastian. Royaume chrétien, le Saint-Siège dépêchera même des représentants officiels à Warri avant que celui-ci ne finisse par plonger dans une longue crise de succession entre 1848 et 1936. Dès lors son histoire va se mélanger avec celle très tumultueuse du Nigéria.

C’est une faction séditieuse qui a refusé d’entériner la montée sur le trône du prince Tsola Emiko(37ans), fils du roi Ikenwoli Godfrey Emiko. Selon les rebelles conduits par Chief Ayiri Emami, le fils du souverain est disqualifié puisqu’il est né d’une mère Yorouba et non native de Warri. Une condition préalable pour ceindre la couronne dans un royaume où on ne badine pas avec le concept ethnique. Ce qui peut paraître ironique quand on sait que divers souverains de Warri se sont régulièrement mariés avec des portugaises. Interviewé par la télévision nationale, le conseiller du roi s’est défendu pourtant de toute animosité envers le nouvel Olu, affirmait n’être ici que pour faire « respecter les traditions ». C’est dans ce climat de tension que les deux couronnes de diamants et d’argent ont disparu de l’Aghofe, le palais royal. Pis, la chambre qui contenait ces deux regalia a été retrouvée fermée, la clef introuvable, ne permettant pas à la police de pénétrer dans la chambre sacrée pour relever des indices.

« Il est exact que la couronne a été enlevée du palais. Nous ne savons pas qui est responsable de ce vol malheureux. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il ne se trouve nulle part dans le palais », a déclaré un membre du palais dès les premiers jours de l'enquête. L’histoire est même devenue nationale. Le président Muhammadu Buhari est sorti de sa réserve et a exigé que le royaume «règle ses différents et désigne un souverain rapidement». Pour le gouvernement, des affrontements entre les partisans des deux camps pourraient menacer la stabilité d’une région qui est une des principales sources d’exploitation pétrolière du pays. Pour ce géant de l’Afrique de l’Ouest, déjà menacé par les djihadistes de Boko Haram, un autre foyer de tensions ne serait pas acceptable. L’enquête a mobilisé des dizaines d’hommes afin de retrouver la clef disparue et des dizaines de dignitaires du royaume ont été convoqués au poste de police de Warri, tous niant être liés à la disparition des couronnes. Entre temps, Chief Ayiri Emami a été destitué de ses fonctions et remplacé par le prince Emmanuel Okotie-Eboh.

Coup de théâtre inattendu. Hier, la police nationale a annoncé avoir enfin retrouvé les clefs  de la chambre royale après que des chefs du conseil aient été arrêtés. Parmi lesquels, le chef Ayiri Emami, qui aurait admis être l’auteur du vol. Reste à savoir où sont les couronnes qui permettront enfin au prince Tsola Emiko d’être sacré nouveau roi de Warri et la paix de revenir à nouveau dans le Delta.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 04/05/2021

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