"Soyez Unis ! " demande le prince Sélassié

«Nous sommes un grand peuple (…), nous pouvons et nous allons l'emporter face à cette nouvelle crise (…)». Petit-fils du dernier Négus et président du Conseil de la couronne d’Ethiopie, le prince Ermias Sélassié s’est adressé à son pays, victime du covid-19. Une déclaration aux accents nationalistes et christiques.

Ermiasnew«Aujourd'hui, alors que l'humanité est la victime d'un virus mondial et aveugle nous sommes entrés dans une nouvelle ère de bouleversements économiques. Le peuple éthiopien est mis au défi comme jamais auparavant ». Le ton est grave. Publié le 7 avril, à la fois en anglais et en amharique, la langue natale du prince Ermias Sélassié et que l’on dit avoir été celle du Christ, le communiqué se veut pourtant rassurant et tente de galvaniser la fibre nationale de ses compatriotes comme faire appel à leur foi orthodoxe.

Le prince Ermias Sélassié a tout juste quatorze ans quand, le 12 septembre 1974, la monarchie éthiopienne tombe. Il a connu les ors et les splendeurs du palais du Jubilé, à Addis Abeba. Il a souvent croisé le Négus Hailé Sélassié Ier qui descend (tout comme lui) du fruit des amours de la reine de Saba et du roi Salomon. Dans le sang de ce prince impérial coule plus de deux mille ans d’histoire, balayées en quelques heures par les kalachnikovs des officiers marxistes qui imposent bientôt leur dictature sur l’ensemble du territoire. Pour le prince Ermias, c’est un exil de 17 ans qui débute et qui va le conduire en Europe puis aux Etats –Unis. il assiste impuissant à l’assassinat du souverain, à la famine qui dévaste les terres rouges de l’Ethiopie, la guerre civile qui éclate et qui va finalement mettre à bas le régime du colonel Hailé Mariam Mengistu en 1991. L’heure est à la reconstruction, à la promotion de la restauration de la monarchie dont les espoirs sont vite douchés avec le nouveau gouvernement du premier ministre Meles Zenawi qui pourchasse ses anciens alliés. Ermias Sélassié prend la tête du Conseil de la couronne d’Ethiopie en 1993 et ne va pas plus le quitter. Très influent au sein de la diaspora éthiopienne et de la communauté rastafarienne, il s’attelle depuis à réhabiliter la mémoire de l’empereur dont on a retrouvé le corps enterré sous le bureau de Mengistu. Une statue du Lion de Judah a été enfin érigée devant les locaux de l’Union africaine en février 2019 et inaugurée en grandes pompes par le nouveau gouvernement et les membres de la maison Salomonide. Une revanche de l’histoire.

Mais aujourd’hui, c’est une autre guerre que doit livrer ce père de deux enfants et dont les monarchistes éthiopiens verraient bien monter sur le trône. Bien qu’il ne soit que neuvième dans l’ordre de succession de la maison impériale. «Il semble que le Tout-Puissant, dans sa sagesse infinie, a envoyé une épreuve de plus au peuple éthiopien, alors que nous sortions à peine de près d'un demi-siècle de souffrance. Il nous a donné un moment pour souffler, mais seulement afin que nous puissions gagner en force et faire face à cette crise que nous traversons» écrit le prince impérial. Et à la piété religieuse, le fils du prince Sahle Selassié et de la princesse Mahisente Habte Mariam, exalte la fibre nationaliste de ses concitoyens et appelle à l’unité.

« Ceci est notre véritable épreuve. Nous pensions avoir brisé les chaînes du communisme et de la tyrannie. Nous pensions que nous étions prêts à reprendre le chemin vers une véritable démocratie. Puis cette nouvelle crise nous a assaillis, ainsi que le monde entier. Maintenant, nous devons mettre de côté l'amertume de ces années. Nous sommes un grand peuple, composé de nombreux clans et tribus tous égaux entre eux. Et nous ne survivrons à ce nouveau fléau de difficultés économiques et morales, et ne reviendrons sur la voie de la prospérité que si nous nous concentrons sur l'importance de l'unité et rejetons les petites choses qui nous polluent » poursuit Ermias Sélassié qui se veut fédérateur.

«Nous savons que nous pouvons et que nous allons l'emporter face à cette nouvelle crise. Nous pouvons et allons vaincre ce fléau, qui a déjà fait ses premières victimes tant en Ethiopie que dans la diaspora. Face à lui, nous serons unis comme jamais auparavant. Ceux que nous avons perdus à cause de ce virus, et ceux que nous pouvons perdre encore, sont désormais des martyrs qui nous poussent à devenir des êtres humbles, à cesser nos querelles et à nous retrouver » a renchéri en guise de conclusion le prince impérial qui appelle les éthiopiens à faire preuve d’autonomie, de protectionnisme et d’entraide. Avant de remercier le personnel médical et le gouvernement qui a su prendre rapidement des mesures sanitaires afin de limiter les ravages du coronavirus.

Copyright@Frederic de Natal

 

Date de dernière mise à jour : 10/04/2020

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