L’Empereur des Mossis est menacé par de mystérieux inconnus
L’Empereur des Mossis est menacé par de mystérieux inconnus
Haute autorité monarchique du Burkina Faso, le Mogho Naba Nana Ousmane Congo Baongo II a-t-il été menacé par un groupe mystérieux ? Alors que le pays est en proie à une crise politique importante et à des incursions de djihadistes, des vocaux distillés sur les réseaux spéciaux ont affirmé que le palais royal de l’Empereur des Mossis avait échappé à une tentative d’incendie et d'assassinat, suscitant émoi et confusion au « pays des hommes intègres».
C’est le scepticisme qui règne au sein de l’Empire mossi. Dans la nuit du 1er au 2 mai 2023, les réseaux sociaux du Burkina Faso ont été soudainement envahis par des messages alarmistes, vocaux pour certains, affirmant que le palais royal du Mogho Naba allait être incendié (ou avait échappé à un incendie ?). Haute autorité monarchique de l’ancienne Haute-Volta, bien que leurs pouvoirs aient été réduits à l’indépendance (1960), les Empereurs mossis restent influents et respectés par tous les gouvernements. Ousmane Congo Baongo II est monté sur son trône en 1982. Malmené sous le régime de Thomas Sankara (1983-1987), il a été l’objet de toutes les attentions sous celui de Blaise Compaoré (1987-2014). Incontournable, nommé médiateur à de nombreuses reprises dans les crises politiques qui se sont succédé depuis le coup d’État, il rest encore une ombre tutélaire, symbole d’unité. Son pouvoir dérange et se retrouve aux cœurs de toutes les supputations. Dans les messages publiés sur les réseaux sociaux, le monarque était accusé « d’être un opposant» au capitaine Ibrahim Traoré qui s’est emparé du pouvoir en octobre 2022.
La plus haute autorité traditionnelle menacé par un complot ?
Très rapidement, des milices se sont formées pour protéger le souverain avant que le gouvernement ne soit contraint d’intervenir, démentant formellement toute tentative d’incendie du palais royal. « Le Gouvernement rassure l’opinion burkinabè qu’il n’en est rien et appelle les citoyens honnêtes à se démarquer de ces machinations et à vaquer sereinement à leurs occupations. Il informe les populations que ces allégations subversives sont le fait d’individus instrumentalisés dans le dessein de perturber l’ordre public et semer le désordre. Le gouvernement met fermement en garde les responsables de ces publications et leurs commanditaires et prévient que les personnes impliquées dans ces manœuvres se verront appliquer toute la rigueur de la loi »a déclaré le porte-parole du capitaine Ibrahim Traoré dans un communiqué rendu public. « Il ressort des premiers éléments de l’enquête que ces différents messages audios, contrairement à ce qu’ils peuvent laisser croire, émaneraient d’une même source. Leurs auteurs auraient été approchés pour l’enregistrement et la diffusion de ces audios, le tout contre rémunération. D’autres personnes approchées dans ce sens avaient décliné l’offre et s’en étaient ouvertes à notre parquet tout en expliquant les différentes étapes qui ont conduit entre autres à l’édition de ces messages. La conséquence logique de ces audios aurait été l’affrontement entre les partisans et les adversaires de la destruction du palais du Mogho Naba, avec des conséquences lourdes ; toute chose qui semble être l’un des objectifs de leurs auteurs et commanditaires » a affirmé, de son côté, le procureur du Faso en charge de cette affaire. Tout porte à croire que l’empereur des Mossis était visé pour le régime putschiste qui a dénoncé un complot. Le Mogho Naba Ousmane Congo Baongo II n’a pas souhaité faire de déclarations afin de ne pas envenimer une atmosphère très nébuleuse et très tendue depuis des mois.
Empereurs craints mais sans pouvoirs régaliens
Établis en confédération dès le XIe siècle, les royaumes Mossis deviennent très rapidement les rivaux commerciaux et militaires de l’Empire du Songhaï et du Mali. Contrôlant la route des esclaves et du commerce, cette monarchie se fait remarquer par sa forte cohésion sociale et religieuse d'où vont émerger les rois (Mogho Naba) de Ouagadougou. Lorsque les Français pénètrent dans cette partie de l’Afrique, au cours du XIXe siècle, l’Empire mossi est en pleine crise de succession. Craint et révéré, le Mogho Naaba Wobgho Boukary Koutou (1850-1904) va s’opposer aux nouveaux colons, humiliés que le souverain leur ait préféré les Anglais présents au même moment dans ette partie de l'Afrique. Lorsque les Français décident de se débarrasser de ce monarque, les Anglais se retirent et abandonnent le Mogho Naba à son sort. Désormais, l’administration française va nommer les souverains, réduits au simple rang de fonctionnaires princiers. Ralliés à la France gaulliste durant la Seconde guerre mondiale où ils organisent la résistance, les Empereurs mossis tenteront vainement de reprendre le pouvoir afin de proclamer l’indépendance de la colonie voltaïque sous leur joug (1958). Un geste que ne leur pardonneront pas les partis républicains de l’époque lorsque celle-ci sera effective deux ans plus tard.