Les russes rendent hommage au Tsar et à sa famille

Nicolas ii et sa famille 1«Nicolas Alexandrovitch, vos amis ont essayé de vous sauver mais ils n’y ont pas réussi. Nous sommes dans l’obligation de vous fusiller. Votre vie est terminée».  Réunie dans la cave de la maison Ipatiev, dans la nuit du 16 au 17 juillet 1918, la famille impériale des Romanov vient de comprendre que les bolcheviks ont décidé de leur destin. 102 ans plus tard, la Douma (parlement) rend hommage au tsar Nicolas II, la tsarine Alexandra et leur cinq enfants ainsi qu’aux russes blancs qui ont combattu le communisme durant la guerre civile.

Pour «leur humilité, leur patience et leur douceur». Le 15 août 2000, l’église orthodoxe de Russie  annonce que les membres de la maison impériale, victimes d’une exécution dans la cave de la maison Ipatiev, à Iekaterinbourg, et au centre d’un mystère qui va durer près de sept décennies avant que l’on ne retrouve leurs ossements, sont désormais des saints. Depuis cette date, Nicolas II, la tsarine Alexandra, le tsarévitch Alexis, les grandes-duchesses Olga, Tatiana, Maria et Anastasia font l’objet d’une profonde vénération en Russie. Leur mort tragique a secoué une Europe plongée dans un conflit mondial que le Tsar a tenté d’éviter avant d'être contraint de respecter les traités d’alliance qui liait son pays aux pays de l’Entente. Nicolas II sera d’ailleurs le premier à tomber, suivi par le reste de sa famille. Encore vivant, à peine dans son adolescence et malade, Alexis rampe sur le sol, gémit. Le commissaire bolchevik Peter Ermakov va s’approcher de lui et d’un coup de crosse lui brise le crâne avant d’ordonner qu’on transperce les corps de baïonnettes.

Tête du cortège le 16 juillet 2020Chaque année, ils sont des dizaines de milliers de russes à participer à la marche commémorative qui honore la famille impériale, Popes en tête aux côtés de nombreuses associations religieuses, nationalistes et monarchistes. Parmi elles, le mouvement «Aigle à deux têtes» de Konstantin Malofeev, conseiller de Vladimir Poutine qui rêve de restaurer l’empire tsariste défunt. « Nous sommes monarchistes, car il serait étrange d'aimer la Russie jusqu'en 1917 et de ne pas être monarchiste. L'avenir de la Russie appartient à la monarchie, qui pourrait être légalement rétablie par l'Assemblée constitutionnelle» s’était justifié cet oligarque lors d’une interview au journal «Le Figaro». L’homme est influent et très sulfureux. Il est également la tête pensante et la manne financière derrière le Congrès des Familles qui draine chaque année ce que l’Europe a de plus ultra-conservateurs dans ses rangs. On le suspecte même de vouloir couronner son protecteur : «Il y a une crise politique dans le pays et il y a une demande pour un parti monarchiste» renchérit-il. Selon Malofeev, 28% des Russes adhèrent à l’idée monarchique. «Bien sûr, ce sont des gens qui aiment Vladimir Poutine et voient la poursuite de son pouvoir dans l'esprit monarchique impérial. Je partage ces valeurs», explique t-il encore. Tous ne sont pas d’accords avec lui.

Membre du mouvement aigle a deux tetesD’autres monarchistes  soutiennent la légitimité au trône de Russie de la Grande-duchesse Maria Wladimirovna. Une mouvance qui compte quelques dizaines de milliers de membres à travers la Russie mais dont «l’influence est assez minime» estime Roman Lunkin, chef du Centre pour l'étude de la religion et de la société. Et qui explique que la figure de Poutine fait assez illusion aux russes pour qu’il préfère garder  la copie à l’original. Pour le moment. Largement réhabilités depuis la chute de l’Union soviétique, les Romanov ont de nouveau leurs statues dans toute la Russie et des aéroports ont même été baptisés de leurs noms. Ils ne sont plus diabolisés. 43% des russes compatissent à leur tragédie selon divers sondages. Pour certains, il ne fait pas bon d’attaquer la figure du Tsar. Les producteurs du film «Mathida», qui évoque un trio amoureux entre la ballerine polonaise, le souverain et un de ses cousins, ont du faire face à de sevères oppositions  jusqu’au parlement.

Monarchiste russe venant rendre hommage au tsar nicolas ii«L'année dernière, ce jour-là, tous les partis politiques ont payé une minute de silence à la mémoire de toutes les victimes de la guerre civile de 1917-1920. Je propose d'honorer aujourd'hui toutes les victimes de la guerre civile du XXe siècle » a déclaré à la tribune du parlement, le président de la Douma d'État, Vyacheslav Volodine. Peu de temps après la chute de la monarchie, la Russie a sombré dans une longue civile entre «blancs» et «rouges» qui fera entre 8 et 20 millions de morts, saignant le pays de Vladimir le Grand. Toutefois, le Kremlin ne devrait pas s’associer à ces commémorations nostalgiques, trop partisanes et mystiques. Par le passé, le président Poutine a critiqué Nicolas II et a reproché au souverain sa faiblesse. Pour le dirigeant russe, il est aujourd’hui plus important de glorifier les deux histoires du pays, tsariste et communiste, afin de mieux réconcilier une nation brisée idéologiquement.

10000 russes sont venus rendre hommage au TsarPandémie de coronavirus oblige, le gouvernement avait demandé à l’église de faire respecter des règles strictes de distanciation et de port du masque ou voir de s’abstenir d’y aller. Ce matin, les représentants de la procession reconnaissaient que seules 10000 personnes s’étaient jointes au cortège. L’an passé, ils étaient 70 000. Des conférences en ligne et expositions d'objets inédits ont été organisées afin que tous puissent venir rendre un dernier hommage à ces saints impériaux, victimes du communisme.

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Date de dernière mise à jour : 17/07/2020

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