Le Labour a déposé un projet de loi pour abolir la Chambre des lords
Le Labour a déposé un projet de loi pour abolir la Chambre des lords
C’est une véritable révolution qui est en marche au Royaume-Uni. La Chambre des lords va faire l’objet d’une profonde refonte. Les Travaillistes entendent mettre fin au principe d’hérédité qui caractérise la Chambre haute du parlement, l’une des plus importantes de la monarchie britannique.
Le gouvernement travailliste du Premier ministre Keir Starmer a dévoilé un projet ambitieux visant à réformer la Chambre des lords, marquant ainsi le plus grand bouleversement parlementaire depuis un quart de siècle. Ce plan inclut notamment la suppression des derniers pairs héréditaires et l’introduction d’une limite d’âge pour les membres de la Chambre haute. Ces mesures constituent une première étape vers une transformation plus profonde de cette institution, jugée obsolète et éloignée des réalités contemporaines.
Une Chambre qui est un contrepoids à celle des communes au Parlement.
La Chambre des Lords, également connue sous le nom de Chambre haute, est une institution parlementaire indépendante de la Chambre des communes. Alors que 650 députés débattent et votent des nouvelles lois à la Chambre des communes, celle des Lords, aussi appelés « Pairs », jouent un rôle complémentaire. Bien qu'ils ne soient pas élus comme leurs homologues de la Chambre des communes, ils examinent le travail du gouvernement et proposent des modifications aux projets de loi soumis par ce dernier. Avec ses 805 membres, la Chambre des Lords est la deuxième plus grande assemblée parlementaire au monde juste après le Congrès national du peuple chinois. Cependant, contrairement à d'autres institutions, elle ne possède pas un nombre fixe de sièges. Sa taille varie en fonction des arrivées et des départs de ses membres, ce qui lui confère une certaine flexibilité.
Mode d'emploi pour siéger à la Chambre des lords
Il existe trois principales voies pour devenir membre de la Chambre des Lords. La première, qui concerne la majorité des pairs, sont nommés par le monarque sur recommandation du Premier ministre. Bien que la Commission des nominations de la Chambre des Lords les examine, c’est le chef du gouvernement qui a le dernier mot et qui, parfois, doit batailler pour s'imposer ( comme lors du Brexit en 2016). La seconde voie est l'hérédité. Autrefois courante, cette méthode a été largement réduite en 1999 à la demande du travailliste Tony Blair (1997-2007). Ils ne sont plus que 92 pairs à occuper aujourd'hui leur siège par voie héréditaire. Enfin, l'exercice de certaines fonctions, notamment celles d'archevêque d'York ou de Canterbury, donne également droit à un siège à la Chambre des lords. Tout comme la Chambre des communes, celle des lords possède son propre président. Ce poste, créé en 2006, est actuellement occupé par Lord Mc Fall, qui a été élu pour un mandat de cinq ans en 2021. Il a la charge d'accueillir le roi lors du discours du Parlement et de le mener vers son trône où l'attendent tous les lords coiffés de leurs traditionnelles perruques longues.
Une réforme pour mettre fin à un système moyen-âgeux
Depuis son arrivée au pouvoir, le Parti travailliste (Labour) ne cache pas sa volonté de mettre fin à ce qu’il juge comme étant un système inégalitaire. Si le projet de loi, déposé le 5 septembre 2024, était adopté, il mettrait fin à une tradition instaurée en 1801, Keir Starmer a annoncé que l'âge de la retraite serait fixé à 80 ans pour les membres de la Chambre des lords, une mesure qui devrait considérablement réduire le nombre de pairs en poste, avec plus de 150 membres ayant dépassé l’âge requis. Pour les Travaillistes, il est désormais nécessaire de réduire ce nombre de Pairs, tout en garantissant un meilleur équilibre régional et national dans les nominations. Une consultation publique serait même lancée pour définir la composition et le rôle futur de cette chambre.
Les lords se rebellent et refusent le moindre changement
Le retrait des Pairs héréditaires ne fait cependant pas l’unanimité. Lord Strathclyde, ancien chef de la Chambre des lords, a vivement critiqué cette décision, qualifiée « d’acte politique autoritaire et de mauvaise qualité ». Selon lui, certains Pairs héréditaires sont parmi les membres les plus expérimentés et actifs de la chambre. D'autres voix conservatrices, comme Lord Forsyth, voient dans cette réforme une tentative de réduire l'opposition au sein du Parlement, laissant la Chambre des Communes, où le Parti travailliste dispose d'une majorité, sans véritable contre-pouvoir. Des accusations que balayent ministre de la Constitution. Nick Thomas-Symonds a déclaré que cette mesure était une « réforme historique de notre constitution ». « Le principe héréditaire dans l’élaboration des lois dure depuis trop longtemps et est en décalage avec la Grande-Bretagne moderne. La deuxième chambre joue un rôle essentiel dans notre constitution mais on ne devrait pas être autorisé à voter des lois par le simple fait d’avoir hérité de son siège par droit familial », a-t-il ajouté, estimant que cette Chambre contrevient aux aspects premiers d’une démocratie.
Charles III acceptera t-il de signer une telle loi ?
Si la suppression des pairs héréditaires constitue un premier pas dans ce qui est une véritable révolution, le Parti travailliste entend également repenser plus largement la Chambre des lords. Le Premier ministre, Sir Keir Starmer, s’est exprimé en faveur de la création d’une Assemblée des Nations et des Régions, élue démocratiquement, pour remplacer la Chambre des Lords. L’idée de remplacer une chambre non élue par une assemblée représentative avait déjà été explorée sous la coalition gouvernementale de 2010-2015, mais les tentatives des Libéraux-démocrates avaient échoué face à l’opposition des conservateurs et de l'aristocratie qui avait front commun face à cette réforme. Rien d'étonnant en soi puisque la moitié des Pairs héréditaires en poste sont affiliés au Parti conservateur, ce qui rend cette nouvelle tentative d'autant d’autant plus symbolique qu’elle sera très vite contestée par les premiers concernés.
Il reste à voir comment ces réformes seront perçues par les électeurs, si elles parviendront à surmonter les résistances conservatrices qui se profilent à l’horizon et si le roi Charles III accepterait de signer une loi qui sape fondamentalement l’essence de sa monarchie sacrée. Rien n'est moins sur aujourd'hui face à une loi dont les chances d'aboutir sont aujourd'hui assez minces.