Bien que le retour de la monarchie n’a pas été au centre de la campagne pour l’élection du prochain président en Roumanie, parmi tous les candidats au strapontin suprême, les deux favoris de ce scrutin se distinguent par leur sensibilité à la question royale.
C’est une élection présidentielle qui aura connu de nombreux rebondissements. La qualification candidat pro-russe, Călin Georgescu, au lendemain du premier tour du 24 novembre 2024, a provoqué une onde de choc dans une Roumanie habituée à jongler entre sociaux-démocrates (PSD) et libéraux-conservateurs (PLN).
Un scrutin électoral entaché par des accusations d’ingérence tant de la part de Bruxelles que de Moscou, que la Cour constitutionnelle a fini par annuler, invoquant le rôle du réseau social Tik Tok en faveur du candidat d’extrême-droite (depuis placé sous contrôle judiciaire) dans la campagne.

La question du retour de la monarchie évoquée au cours de la campagne
Le 4 mai 2025, les Roumains seront donc appelés à se prononcer à nouveau entre plusieurs nouveaux candidats, après une nouvelle campagne marquée par une profonde division idéologique. Parmi tous ceux qui entendent remporter le strapontin suprême, les deux favoris à cette élection se distinguent par leur sensibilité monarchique. Une question qui n’a pourtant pas été au cœur de cette campagne, mais dont le potentiel lectorat est un puits de voix à ne pas négliger.
Abolie en 1947 après un coup d’État communiste qui a contraint le roi Michel Ier à abdiquer et à quitter son pays pour un long exil qui s’est achevé après la chute du Mur de Berlin, le retour de la monarchie n’a cessé d’agiter la vie politique roumaine, avec une maison royale de plus en plus omniprésente et considérée comme une alternative possible à une système institutionnel miné par la corruption de ses élites, intervenant même au Parlement. Une assemblée nationale qui a restauré le blason royal comme emblème officiel de la République.

Le candidat Libéral-conservateur propose un débat sur l’institution royale
Pour Crin Antonescu, ancien président du Sénat (2012-2014), la question mérite d’être débattue. « Ma sympathie pour la monarchie, une sympathie intellectuelle et non-émotionnelle, est bien connue », a déclaré le candidat qui se présente sous une liste rassemblée les principaux partis roumains (PSD-PNL-UDMR). « Bien sûr, si nous devons un jour avoir un grand débat national sur la forme de gouvernement – république présidentielle, république semi-présidentielle, république parlementaire –, nous devrons également évoquer la monarchie, qui est, par essence, similaire à la république parlementaire. Mais au lieu de voir élire un président par les parlementaires, il y aura un monarque, à la fois représentant une stabilité et une forme de prestige », a-t-il ajouté lors d’une récente interview.
Ce n’est pas la première fois que Crin Antonescu affirme réfléchir au retour de la monarchie. « La monarchie constitutionnelle est certainement la forme de gouvernement la plus pratique pour un pays comme la Roumanie », n’avait pas hésité à déclarer le candidat en 2012 à un moment où l’idée monarchique avait le vent en poupe. Aujourd’hui, c’est environ 30% de la population qui souhaite le retour de la monarchie, le couronnement de Sa Majesté la princesse Margareta, fille du roi Michel Ier. Une maison royale où tous politiques, ministres, maires, présidentiables se précipitent pour rencontrer la prétendante au trône, « un état dans l’état ».

L’extrême-droite courtise les monarchistes, la Maison royale en retrait
George Simion, qui remplace au pied levé Călin Georgescu, est un admirateur du Président Donald Trump, un critique de l'Union européenne et un partisan de la Grande Roumanie dont les frontières ont été redessinées après la Seconde Guerre mondiale. Sans être qualifié de pro-russe, il est contre toute intervention militaire en Ukraine. Lui aussi regarde dans la direction de la monarchie. En 2012, il avait également déclaré « qu’il valait mieux élire un roi que d'avoir les présidents que nous avons eus ». « Plutôt que ce genre de présidents, oui, mieux vaut une monarchie. J'ai honte des présidents que nous avons eus », avait encore surenchéri ce candidat controversé de l’Alliance pour l’unité des Roumains (AUR) qui compte des soutiens avérés au sein de la mouvance monarchiste.
Par le passé, de nombreux candidats ont pris une posture monarchique sans finalement soumettre à référendum la question de monarchie en dépit de leurs multiples promesses en ce sens. Si la Maison royale de Roumanie a condamné les ingérences russes durant la précédente campagne, sans évoquer une seule fois celle présumées de l’Union européenne à qui elle ne cache son soutien, elle s’est bien gardée de participer directement au processus électoral en cours. Tout comme la mouvance monarchiste qui reste divisée sur ses intentions de vote.
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