Le roi Willem-Alexander rend hommage à la France impériale

En visite d’État pour deux jours aux Pays-Bas, le président Emmanuel Macron a été reçu par le roi Willem-Alexander. Lors du banquet organisé au palais d’Amsterdam, le monarque batave a vanté les mérites du Premier empire, dont l’héritage administratif reste les « fondements de notre État de droit et notre réflexion sur la relation entre le gouvernement et les citoyens », et rendu hommage au roi Lodewijk Napoléon I.

C’est avant tout un voyage effectué au nom de la coopération européenne. En visite aux Pays-Bas, durant deux jours, du 11 au 12 avril 2023, le président Emmanuel Macron et son épouse Brigitte ont été reçus par le roi Willem-Alexander et la reine Maxima. Lors du banquet d’État organisé au palais royal d’Amsterdam, le souverain batave a décidé de transformer la soirée en une véritable leçon d’histoire devant un parterre d’invités triés sur le volet. « Vous êtes ici dans le Palais Royal d'Amsterdam. Un lieu adapté. Dans ce palais, on sent encore le souffle de la France. C'est ici que le premier roi des Pays-Bas a élu domicile. Louis Napoléon, frère de l'empereur Napoléon Bonaparte. Il a régné sur le royaume de Hollande pendant quatre ans, il y a plus de deux siècles » a déclaré le roi Willem-Alexander dès le début de son discours.

Banquet d'Etat le couple présidentiel Français et le couple royal néerlandais@ photos koninklijk huis

Un règne qui a transformé les Pays-Bas  

Lorsqu’il devient Empereur des Français en 1804, Napoléon Ier va s’empresser de créer des couronnes pour ses frères et ses sœurs. Une famille de la noblesse corse se mue en véritable dynastie internationale qui cousine encore aujourd’hui avec tout le Gotha européen. Sous influence française, la République batave va être transformée en royauté pour Louis Bonaparte (1776-1846), frère du héros d’Arcole. Pour les Néerlandais, ce n’est pas un inconnu. Il a occupé les territoires bataves en 1805 avant de s’en retirer promptement dès l’annonce de la paix signée. Militaire, officier, Louis se battait d'ailleurs plus par devoir que par passion des armes. Au départ, la perspective de régner sur ce pays froid rempli de tulipes ne lui convient guère. Il souffre de rhumatisme, va souvent en cure. Pourtant, il se plie à la volonté de son frère qui ne prend même pas la peine de recevoir la délégation venue offrir une couronne à Louis et à son épouse Hortense de Beauharnais. C’est en mai 1806 que le roi Lodewijk Napoléon Ier fait son entrée dans Amsterdam. Pragmatiques, les Néerlandais ont compris qu’il valait mieux une monarchie, symbole de prospérité économique qu’une annexion, signe d’un désastre économique. Louis Bonaparte va rapidement s’atteler à sa tâche de souverain. Il entend être une « majesté nationale » au service de ses sujets. Il commande des dizaines de rapports afin de connaître tout de son nouveau pays, apprend même la langue de son royaume et refuse que le Français la remplace administrativement. « Le chef suprême de l’administration doit imprimer à toutes ses branches son esprit, sa volonté : c’est l’unité de mouvement qui est le principal avantage de la monarchie » expliquera plus tard le frère de Napoléon Ier dans ses mémoires.

Louis Bonaparte et son fils Louis Napoleon II @Wikicommons

Le roi Willem-Alexander rend hommage à la France impériale

Louis Bonaparte a laissé derrière lui l’image d’un souverain profondément réformateur. « Le fait est que nous, Néerlandais, devons beaucoup à cette époque. Les Français y ont introduit l'état-civil. Le Cadastre. Le système métrique. Ils ont jeté les bases du Rijksmuseum. La Bibliothèque Royale. L'Académie des sciences. Mais le plus beau cadeau français est peut-être le « code Napoléon ». Les fondements de notre État de droit et notre réflexion sur la relation entre le gouvernement et les citoyens. Les citoyens sont libres ! Tous sont égaux devant la loi ! Ce sont des valeurs essentielles. Ces mêmes valeurs nous relient encore aujourd'hui » a justement rappelé justement le roi Willem-Alexander dans son discours. Lorsque deux catastrophes frappent le pays (explosion d’un bateau chargé de poudre en 1807 et une inondation en 1809), Louis Bonaparte donne de sa personne. Il rejoint même les équipes de reconstruction des digues, achevant de confirmer sa popularité parmi les Néerlandais. Un sentiment qui agace Napoléon Ier. Plus d’une fois, il reproche à son frère de privilégier son royaume au détriment de l’Empire français (Louis refuse d’engager ses troupes dans les conflits de Napoléon Ier). Tant et si bien que Louis est poussé à l’abdication en faveur de son fils Louis-Napoléon II Bonaparte (1804-1831) qui ne règnera du 1er au 13 juillet 1810. C’est l’exil pour Louis Bonaparte, également père du futur Napoléon III. Il ne reverra jamais les Pays-Bas qui replaceront bientôt la dynastie d’Orange sur leur trône.

La principauté d'Orange et son dernier prince Guillaume III @Wikicommons

France et Pays-Bas, une histoire et une frontière commune

C’est cette France, cette Europe napoléonienne à qui le roi Willem-Alexander a souhaité rendre hommage. « Ensemble avec vous, nous défendons la bannière de la liberté et de la justice ! La violence et la terreur ne doivent plus jamais dominer l'Europe. C'est pourquoi nous soutenons le peuple ukrainien dans sa résistance à l'agression russe. Avec vous, nous construisons une Europe résiliente qui peut aussi faire ses propres choix à l'avenir. Et à cette fin, nous recherchons la coopération avec tous les partenaires de bonne volonté. La renaissance de l'Europe devient une réalité » poursuit le souverain qui n'a pas non plus oublié que ses ancêtres ont aussi régné sur la principauté française d’Orange dont l’indépendance prendra fin avec l’annexion de ce territoire par Louis XIV (1673).  « ‘Paris' est une ancre pour nous. Pour nous, 'Paris' est plus qu'un centre de culture et de civilisation. C'est aussi la ville de l'Accord sur le climat qui nous engage à agir concrètement » explique le roi Willem-Alexander qui n’hésite pas à citer Voltaire.

Pour le roi Willem-Alexander, la France partage autant des valeurs que des frontières communes (notamment dans les Caraïbes) avec son pays. Un discours très francophile, le temps d’une soirée, qui a remis la diplomatie française au centre de l’échiquier européen, un bel hommage à l’histoire impériale de France qui a encore de nombreux partisans et aficionados aux Pays-Bas.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 13/04/2023

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