Le Congrès UMI

« L'idée monarchiste reste une cause juste à défendre ! »

Antonio Tajani, Président du parlement européen (2018)

Le 3 novembre 1918, le bruit des combats cesse enfin sur le champ de bataille de Vittorio Veneto.  Les Alliés se méfiant de la réalité militaire du royaume italien, alors aux prises avec les forces austro-hongroises, avait contraint Rome à passer à l’offensive. A quelques jours de la signature de l’armistice, cette bataille devait s’avérer décisive dans ce premier conflit mondial dont on fête actuellement le centième anniversaire de la fin des hostilités. Elle signe l’arrêt des affrontements avec Vienne et isole le Reich allemand qui capitulera sous peu. La cuisante défaite de Caporetto, un an auparavant, avait été vengée ; la maison de Savoie pouvait fêter le deuxième acte de son Risorgimento.  

C’est pour célébrer cette victoire que l’Union monarchique italienne a rassemblé ses partisans au cours d’un congrès où est intervenu ni plus ni moins que le président du parlement européen, Antonio Tajani. Une commémoration transformée en véritable manifestation royaliste.

91Le dernier sondage sur la possibilité d’une restauration de la monarchie a de quoi réjouir l’Union monarchique italienne (Unione Monarchica Italiana). Paru durant l’été, 15% des italiens, soit plus de 10 millions d’entre eux, souhaiteraient le retour d’un système tombé en juin 1946. Et si l’article 139 empêche toute remise en question de la république italienne, les royalistes ont pu bénéficier du renouveau monarchique en Europe en envoyant un des leurs sur les bancs de l’assemblée nationale (Giuseppe Basini sous les couleurs de la Ligue [-du Nord]) et un autre à la tête de l’institution bruxelloise.

 « Antonio Tajani, un royaliste à la tête du Parlement européen » titre en principale information le magazine Le Point. Lorsqu’il est élu le 17 janvier à la tête du parlement européen, jamais idée monarchique n’avait été portée aussi haut au sein des institutions européennes. Le curriculum vitae d’Antonio Tajani est éloquent.  Officier militaire, journaliste, plusieurs fois vice-présidents de commission européenne, député depuis 1994,  il a été aussi à la tête du Front de la jeunesse monarchiste de l’UMI dans les années soixante et l’homme de confiance de Sergio Boschiero, une des références majeure du monarchisme italien.

«C’est mon intérêt pour l’unité italienne, qui, en quatrième, m’a poussé vers les royalistes. Les années suivantes ont été importantes pour ma formation. C’était des années turbulentes.» écrit alors son sujet le journal Libération.  Il fait le coup de poing contre les communistes, flirte avec les nostalgiques du fascisme avant de « se ranger ». Fondateur du parti Forza Italia avec Silvio Berlusconi, c’est un homme de consensus qui reste fidèle à ses convictions monarchistes. Il avait  d’ailleurs exprimé publiquement son soutien à l'abrogation de la loi d'exil touchant la famille royale de Savoie et qui interviendra en octobre 2002. Le « Corriere della Serra » avait  même publié une photo de lui serrant la main de la princesse Marina de Savoie en 1996, lors du 50ème anniversaire de l'abolition de la monarchie.

94Parlant 4 langues dont le Français, il n’hésite pas à venir se recueillir sur la tombe des derniers Bourbons à Nova Goriça en mai 2017. Lors des élections italiennes de 2018, son nom est cité comme possible président du Conseil en cas de victoire du parti du « Cavaliere » alors les cadres du parti (plusieurs députés et ministres se sont déjà déclarés en faveur de la monarchie par le passé) négocient une alliance avec les royalistes. Preuve en est, la présence lors de ce congrès du président du groupe parlementaire  au sénat de Forza Italia, le très conservateur catholique Maurizio Gasparri ou encore d’Adolfo Urso, sénateur du mouvement des Frères de la Liberté, proche des idées du Front National en France.

Tous reconnaissent en Tajani sa capacité à fédérer alors que le gouvernement de coalition de droite de Matteo Salvini est entré en résistance contre Bruxelles qui vient de rejeter sa proposition de budget. «Je ne suis pas d'accord avec la position italienne, mais je ne suis pas non plus d'accord avec celle de la Commission européenne contre l'Italie. Je ne suis pas d'accord lorsque celle-ci s'oppose à un État membre, lorsqu'elle opte pour une position forte et agressive » a déclaré très agacé Tajani à la presse. « Dans ce Parlement, nous devons respecter certaines valeurs et certaines règles. On peut être contre l'UE, tout en respectant les autres opinions. Je respecte les personnes en faveur du Brexit, je suis contre mais je respecte, ma réaction n'est pas "ahahah" (rire) Ce n'est pas un cirque, c'est le Parlement européen et nous devons le respecter » a encore t-il martelé sur Euronews.

L’UMI a plus de 70 000 membres, une des associations monarchistes les plus importantes d’Europe. Et d’Italie « Les pays qui se rapprochent le plus de l'idée européenne sont indubitablement les monarchies » affirme le président européen, debout à côté des drapeaux de l’ancienne monarchie, qui a pris la parole devant 300 à 400 royalistes rassemblés autour du Président  de l’UMI, Alessandro Sacchi, et le prince Aymone de Savoie-Aoste, accompagné pour la première fois par ses deux garçons, Umberto, 9 ans, et Amedéo, 7 ans. La venue des deux princes héritiers de la branche des Aoste au congrès est inédite. C’est  la première fois qu’ils sont ouvertement montrés en public.

93« Roi victorieux », Alessandro Sacchi exalte la mémoire des soldats morts sur le front tout en « avertissant de ces leçons que nous devons apprendre pour forger le futur ».  Plusieurs fois interrompu par des applaudissements nourris, le leader de l’UMI a souligné que la « construction d’une €urope forte passait par la connaissance de ses propres racines historiques et la fierté de ce qu’elle a été ». « Une histoire qui se mélange à celle de la maison royale » (dont les racines se trouvent en Savoie française-ndlr), a rappelé Alessandro Sacchi qui n’a pas manqué de raconter quelques anecdotes obtenues ci- et là d’anciens combattants encore vivants alors qu’il était jeune militant.

Les interventions de Salvatore Sfercola et d’Andréa Ungari, respectivement Magistrat, ancien président de la Chambre des comptes et professeur d’histoire  ont plongé les participants dans les affres de la première guerre mondiale, qui  a« forgé le ciment de notre identité et notre patrimoine national » sous l’œil attentif du prince Aymone de Savoie –Aoste. Sa maison s’est d’ailleurs beaucoup investie dans le conflit mondial. Le prince Louis de Savoie-Aoste (1873-1933), son arrière-grand-oncle, explorateur reconnu,  sera le commandant en chef de la flotte italienne (1914-1917), s’illustrant en sauvant l’armée serbe du désastre. Son arrière-grand-père, Emmanuel-Philibert (1869-1961) reçut le surnom de « Duc invaincu » lors de la campagne contre l’Autriche-Hongrie et obtint un bâton de maréchalat. Avant de succomber aux sirènes du fascisme.  Autre temps, autre histoire.

 « L’avenir se construit sur les ruines du passé ». Et celui de l’Italie se dessine avec enfants du prince Aymone de Savoie-Aoste, arrière-petits-enfants de feu le comte de Paris, Henri d’Orléans,  et arrière-arrière-petits-enfants de Georges Ier de Grèce,  « incarnation de l’espoir d’une nouvelle renaissance de la patrie italienne » a-t-il crié à l’attention de l’assemblée réunie alors que retentissait les premières notes de l’ancien hymne royal. Sur l’estrade et sous les applaudissements, le prince Aymone a remercié les intervenants avant d’aller se prêter au jeu des photos en compagnie des jeunes du Front de la jeunesse monarchique, drapeaux sortis.

« La monarchie est le renouveau d'une idée nouvelle, une aventure palpitante, adaptable et le régime de nombreuses démocraties sur la terre » avait déclaré celui qui dirige l’UMI depuis 2010 ». « Dans une décennie, la monarchie reviendra en Italie » a affirmé sans l’ombre d’un doute Alessandro Sacchi, dans une interview. « Avanti Savoia ! »

 

Frederic de Natal

Paru le 04/11/2018

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