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Parlange Plantation, le « Tara louisianais » de l’aristocratie française

C’est sous une atmosphère d’« Autant en emporte le vent » que la Parlange Plantation House vous accueille. Fondée par un aristocrate français de la Meuse, ses descendants sont toujours à la tête de cette demeure créole, incontournable de la Louisiane, qui a traversé deux siècles d’Histoire tumultueuse.

René-Robert Cavelier de La Salle (1643-1687) figure parmi les grands héros de l’exploration française. C’est grâce à lui que la monarchie française hérite de la Louisiane, baptisée en hommage à Louis XIV, le Roi Soleil. Un immense territoire qui va bientôt s’étendre des Grands Lacs aux abords du Golfe du Mexique (soit l’équivalent de dix États actuels des États-Unis), qui va faire la fierté d’un royaume et exciter toutes les convoitises des pays voisins. Le Mississipi, ce long fleuve de plusieurs milliers de kilomètres, devient l’objet de tous les imaginaires. Le rêve américain se forge doucement, enthousiasme la noblesse de province en quête de prestige. La France rayonne de toute sa puissance maritime. Parmi ceux qui décident de faire le voyage vers cette nouvelle colonie prometteuse, le marquis Vincent de Ternant, originaire de la Meuse. Il a rendu un énorme service au roi Louis XV. Lequel ? Le mystère demeure toujours est-il que le monarque va lui octroyer très généreusement 10 000 acres de terre près de la localité de Pointe-Coupée. Il rejoint ainsi des milliers de créoles, Français des Antilles, d’Acadiens qui résident dans cette partie des Amériques

Claude de Ternand à Charles Parlange, figures d'une famille de l'aristocratie française aux USA @ wikicommons

Une famille, symbole de l'Ancien Régime aux Amériques

Le marquis va se lancer dans la culture de la Canne à sucre qui va faire la fortune de sa famille. Détenteur de centaines d'esclaves, Vincent de Ternant fait ériger une imposante maison de style colonial (1750). Les murs et les plafonds de la maison sont construits avec des planches de cyprès chauve bien ajustées pour les murs et le plafond. Sur deux étages, on dénombre sept chambres de service, disposées en double rangée. Agrémenté d’un pigeonnier octogonal, le marquis tient à rappeler ses origines et impose un jardin à la française autour de la demeure. Vincent de Ternant est un aristocrate comblé aux Amériques qui peut laisser une belle succession à ses fils lorsqu’il décède en janvier 1757.  Une dynastie est née et son destin va s’entremêler avec celui de la Louisiane qui va bientôt passer sous le giron espagnol en 1762.  Claude Vincent de Ternant (1757-1818) hérite du titre de marquis et de la propriété familiale. Avec l’arrivée des hispaniques dans la colonie, il s’empresse d’étendre ses activités commerciales à Paris où il ouvre un siège. C’est d’ailleurs en France que son demi-frère, Jean de Ternant (1751-1816) va faire ses armes avant de repartir en Amérique du Nord. Ce dernier va participer à la Guerre d’indépendance aux côtés des insurgés et de l’armée française venue en renfort afin de bouter les Anglais de cette partie du continent. Il finira même ministre plénipotentiaire du roi Louis XVI aux États-Unis. En Louisiane, Claude Vincent de Ternant continue de faire fructifier les affaires familiales, anime les nuits de la ville par de somptueuses soirées. Il suit les événements qui se déroulent en France en proie à une révolution. Il va dès lors s’adapter. En France, il ne portera plus de particule ni de titre, mais en Louisiane, il demeure un marquis et utilise sa titulature d’Ancien Régime. De son mariage avec Marie-Céleste Constance Lacour (1766-1837), il a eu trois enfants. Claude Vincent II (1786-1842) reprendra la plantation sous l’œil de sa mère qui est une personnalité de la ville très en vue. 

Des aristocrates aux côtés de la Confédération

Redevenue française en 1800 lors du traité de San Ildefonso, Napoléon Ier décide finalement de la vendre aux États-Unis trois ans plus tard. Une vente controversée dont les contours sont assez juridiquement contestables. Pour les Ternant, cette cession ne change en rien leurs activités commerciales d’autant que des milliers de planteurs créoles affluent dans l’État avec la révolte de Saint-Domingue. La plantation est en plein essor et va être bientôt confrontée à la question de l’esclavage lorsque la guerre de sécession éclate. Marius Vincent Ternant (1837-1861) qui a succédé à son père, meurt très rapidement, résultat d’une vie dissolue, laissant sa mère, Virginie de Tenant (1818-1887), esseulée, à la tête de la vaste exploitation. En 1861, la Louisiane a pis la décision de rejoindre la Confédération (les Français s’organisent alors en milice en dépit de l’interdiction de Paris. Ils vont constituer une Légion affectée à la protection de la Nouvelle-Orléans, ornée d’un drapeau sur lequel on a placé un aigle aux allures napoléoniennes, soutenue par des prêtres enflammés). La plantation ne peut se passer d’un homme et Virginie de Tenant le sait parfaitement. Elle s’unit au colonel Charles Parlange (Français d’origine) qui donne son nom à la plantation qui continue de le porter encore aujourd’hui. Alors que les soldats de l’Union approchent de sa plantation, Virginie de Tenant s’empresse de faire enterrer son or et ses bijoux à trois endroits différents par des esclaves de confiance. Une fortune de plusieurs millions de dollars dont on ne retrouvera pas grand-chose à la fin de la guerre civile. Une partie demeure encore introuvable dans les jardins de la plantation. Virginie de Tenant accueillera le général Nathaniel Banks avec bienveillance et fera tout aussi bien avec le général Richard Taylor de la Confédération lorsque chacun occupera les lieux. Une décision de compromission qui permet à la villa d’échapper à la destruction (sauf les jardins à la française dont plus rien ne subsiste actuellement). Virginie de Tenant (de nouveau veuve en 1867) peut rendre l’âme, fière d’avoir sauvegarder son héritage, héroïne d’une saga littéraire à succès, écrite par Maurice Denuzière en six tomes. 

Parlange Plantation House

Des descendants qui entretiennent le mythe du Sud

Son fils Charles Parlange (1851-1907) va inscrire son nom dans l’histoire des Etats-Unis. Avec l’abolition de l’esclavage, la plantation perd sa splendeur. Élu  sénateur entre 1880 et 1885, il demeure le dernier symbole de cette aristocratie française qui a su s’adapter à son environnement et se fondre dans la nouvelle culture américaine. Charles Parlange inaugure alors le second chapitre d’une dynastie qui va toucher le sommet du pouvoir. Nommé Lieutenant-gouverneur de Louisiane entre 1892 et 1893, il finira sa vie dans la peau d’un juge fédéral jusqu’à son décès. Walter Parlange (1886-1961) est le dernier témoin d’une génération à cheval entre deux Histoires, celle de la Reconstruction, du retour de la ségrégation raciale, du Ku Klux Klan puis de la fin des lois raciales. C’est lui qui va redonner toute sa noblesse à la plantation qu’il relance. Le travail est gigantesque. Il ne reste plus que 1500 acres de terre (6 kilomètres carrés) cultivables, une maison que l’on va ouvrir aux touristes et qui sera  inscrite au patrimoine de la ville de Pointe Coupée. 

Incontournable de Louisiane, témoin-clef d’un passé français aux États-Unis, Parlange Plantation House est encore occupée par les descendants de Virginie de Tenant qui vous accueille comme au bon vieux temps, celui d’une Louisiane aux accents gaulois. 

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 01/08/2023

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