Les restes du roi Ferdinand Ier bientôt de retour en Bulgarie
Les restes du roi Ferdinand Ier bientôt de retour en Bulgarie
La Maison royale de Bulgarie a annoncé le retour du roi Ferdinand Ier dans son pays. Monarque ambitieux et controversé, son règne a profondément marqué l'histoire des Balkans.
Le communiqué a été discret. Sans donner beaucoup de détails sur les conditions du rapatriement des restes du roi Ferdinand Ier, ni sa date, la maison royale de Bulgarie a annoncé le 11 mai 2024 que son premier souverain allait bientôt pouvoir reposer à nouveau dans le pays qu’il a propulsé de plein pied dans le XXe siècle.
Actuellement dans la crypte de l’église Saint-Augustin de Cobourg depuis le 10 septembre 1948, date à laquelle il a rendu son dernier souffle, son retour en Bulgarie a toujours été rendu impossible sous le régime pro-soviétique. « En dépit du retour de la démocratie, plusieurs comités d'initiative ont été créés afin de pouvoir le ramener mais leurs efforts dans ce sens n'ont pas été couronnés de succès, malgré les bonnes intentions de leurs organisateurs. », explique le site de la maison royale qui ajoute « que les conditions actuelles de démocratie et de respect de l'histoire permettent que la dépouille mortelle du roi Ferdinand repose dans la crypte familiale de son bien-aimé palais Vrana à Sofia ».
Un prince qui a eu du mal à se faire reconnaître par les puissances européennes
Ferdinand Ier de Bulgarie, né Ferdinand Maximilian Karl Leopold Maria de Saxe-Cobourg-Gotha le 26 février 1861 à Vienne, est l'un des personnages les plus fascinants et complexes de l'histoire des Balkans. Issu d'une famille aristocratique allemande, dandy efféminé et bisexuel, il est le fils du prince Auguste de Saxe-Cobourg et Gotha et de Clémentine d'Orléans, fille de Louis-Philippe Ier, roi des Français. Il accède au trône de la principauté de Bulgarie le 7 juillet 1887, après l'abdication forcée du prince Alexandre de Battenberg. Son accession n'est d’ailleurs pas sans controverse, car elle ne reçoit initialement pas le soutien des grandes puissances européennes. Ce n'est qu'en 1896, après la conversion de son fils aîné Boris à l’orthodoxie, que son avènement sera pleinement reconnu par les puissances européennes.
Un règne sous le signe de la modernisation
Durant son règne, Ferdinand s'est efforcé de moderniser la Bulgarie, suivant les exemples des pays d'Europe occidentale. Il met en place des réformes économiques et infrastructurelles qui transforment le pays. L'industrialisation progresse, les chemins de fer s'étendent et l'éducation est garantie pour tous. Sous sa direction, Sofia devient une capitale moderne avec des boulevards, des jardins publics et des bâtiments gouvernementaux imposants. Un règne également marqué par son ambition militaire. En 1912-1913, il joue un rôle clé dans les Guerres Balkaniques, au cours desquelles la Bulgarie cherche à étendre son territoire aux dépens de l'Empire Ottoman. Si les premières victoires renforcent son prestige, la Deuxième Guerre balkanique (1913) se solde par une défaite humiliante et des pertes territoriales importantes. En 1915, Ferdinand engage la Bulgarie aux côtés des Empires centraux (Allemagne, Autriche-Hongrie et Empire Ottoman) pendant la Première Guerre mondiale. Cette décision, motivée par le désir de récupérer les territoires perdus, s'avère désastreuse. Après une série de défaites militaires, la Bulgarie est contrainte de signer l'Armistice de Thessalonique en septembre 1918, marquant la fin de son implication dans le conflit.
Abdication et Exil
La défaite lors de la Première Guerre mondiale mène à une instabilité politique et sociale en Bulgarie. Confronté à une pression croissante, Ferdinand abdique en faveur de son fils aîné, Boris III, le 3 octobre 1918, et prend la route d’un exil qui va s’avérer doré. Faisant face au revers de son destin, il n’hésitera pas à déclarer : « Les rois en exil sont plus philosophes dans les revers que les individus ordinaires ; mais notre philosophie est principalement le résultat de la tradition et de la famille et n'oubliez pas que l'orgueil est un élément important dans la fabrication d'un monarque. Nous sommes disciplinés dès le jour de notre naissance et on nous enseigne à éviter tous les signes extérieurs d'émotion. Le squelette est assis pour toujours avec nous à la table de la fête. Cela peut signifier meurtre, cela peut signifier abdication, mais il sert toujours à nous rappeler l'inattendu. Ainsi nous sommes préparés et rien n'arrive comme étant une catastrophe. L'essentiel dans la vie est de supporter toutes les conditions de l'exil physique ou spirituel avec dignité. Si l'on soupe avec du chagrin, il n'est pas nécessaire d'inviter le monde à vous voir manger ». Il aura encore le temps de voir sa chère monarchie vaciller sous ses yeux depuis sa demeure de cobourg. Boris III meurt mystérieusement en 1943 après un voyage en Allemagne, son second fils, Kyril, sera exécuté par les Soviétiques, deux ans après. « Tout s’écroule autour de moi » aurait dit le monarque en larmes.
Ferdinand Ier reste une figure controversée de l'histoire bulgare. Son règne est marqué par des progrès significatifs en termes de modernisation et de développement, mais aussi par des décisions militaires qui ont eu des conséquences désastreuses pour la Bulgarie. Ambitieux et cultivé, il était aussi perçu comme autoritaire et parfois déconnecté des réalités de son peuple. Selon le communiqué de la maison royale de Bulgarie, il devrait recevoir un hommage national.