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Il y a 30 ans, disparaissait le roi Baudouin Ier

Monté sur le trône de Belgique dans des circonstances agitées, le roi Baudouin s’est éteint au cours de l’été 1993, à l’âge de 62 ans. Trente ans après son décès qui avait bouleversé les Belges de l’époque, ses funérailles suivies par des millions de personnes, le souvenir de ce monarque profondément croyant marque encore aujourd’hui l’esprit des Wallons et des Flamands. 

Le 1er août 1993, la Belgique se réveille sous le choc d’une annonce qu’elle redoutait depuis quelques années. La veille, le roi Baudouin s’est éteint dans sa résidence d’été, en Espagne. Il a succombé à une crise cardiaque. Très vite, les Belges se massent aux abords du palais royal afin de guetter la moindre information. Interrogés, certains ont du mal à croire cette nouvelle. Dix jours auparavant, le monarque avait participé aux cérémonies organisées pour la Fête nationale. Souriant, il avait brièvement accordé quelques minutes à certains de ses sujets, impécablement ceintré dans son uniforme militaire. En dépit de quelques ennuis de santé, il paraissait en bonne santé et avait même démenti les rumeurs d’abdication dont la presse se délectait depuis des semaines, spéculant sur le choix de son successeur : le prince Albert II, son frère, ou bien le prince Philippe, fils de ce dernier. Ses funérailles, suivies par des millions de personnes à la télévision, témoignent alors de la popularité dont il bénéficie. En France, c’est la voix de l’inégalable Léon Zitrone qui accompagnera le défunt souverain vers sa dernière demeure. 

Un prince marqué par le sceau de la tragédie, un roi dont on se méfie

Le 11 août 1950, Baudouin prête serment comme nouveau roi des Belges. Le sixième d’une dynastie aux origines allemandes. Face à lui, députés et sénateurs qui s’inquiètent de ce prince bien mystérieux.  Âgé 21 ans, il  traîne derrière lui l’image d’un prince coincé, introverti, trop sérieux. Héritier au trône, il n’a pas eu une jeunesse facile, frappé par le sceau de la tragédie. Enfant, il a perdu sa mère, la reine Astrid (1935). Un accident de voiture qui choquera les Belges très épris de cette princesse venue de Suède. L’invasion de la Belgique par les Allemands en 1940 projette déjà Baudouin dans le monde des adultes. Une expérience qui va le marquer profondément. Doté d'un certain caractère taciturne Baudouin se lance à corps perdu dans les études. L’attitude de son père, Léopold III, qui n’a guère brillé durant l’occupation, son remariage avec Lilian Baels, provoque une crise monarchique et le début de grèves importantes. C’est la « question royale ». Elle va diviser les Wallons et Flamands et s’achever par le retrait de Léopold III du pouvoir. Une montée sur le trône agitée, une cérémonie perturbée par le député communiste Henri Glineur qui ose l’impensable et crie un « Vive la république » face au roi qui demeure imperturbable. Les élus s’empressent d’applaudir le souverain avant que le député Julien Lahaut ne reprenne le cri de son collègue, signant son arrêt de mort. Une semaine plus tard, le rebelle sera assassiné par des militants anti-communistes. 

La décolonisation belge, une tâche indélébile sur le règne de Baudouin

Souverain des Belges mais également à la tête d’un empire colonial, principalement en Afrique. Il va devoir affronter la montée des mouvements indépendantistes au Congo belge, au Burundi et au Rwanda, Une décolonisation qui va être violente et qui va contraindre des milliers de colons à regagner la métropole. À Bruxelles, la capitale du royaume, tout a été fait pour ralentir le processus d’indépendance du fleuron de l’Empire. Le gouvernement belge se débarrasse tour à tour des principaux leaders qui gênent ses intérêts, négocie avec d’autres plus malléables. Le Congo restera une tache indélébile sur le règne de Baudouin Ier, humilié par le Premier ministre Patrice Lumumba lors d’un discours resté dans les mémoires. Durant des années, cette page noire de l’histoire belge sera occultée et le souverain préservé de tous les dossiers controversés. Encore aujourd’hui, l’image de ce monarque est entourée d’une chape de plomb dont il est interdit de percer le coffrage. Il est pourtant certain que le roi Baudouin Ier a été informé des moindres actions de son gouvernement en Afrique. Pourtant, Bwana Kitoko (Noble Seigneur), comme il sera surnommé au Congo, gardera une affection particulière pour ce continent où il effectuera encore de nombreuses visites entre miel et fiel, laissant un véritble cadeau empoisonné à ses successeurs.

Un mariage d'amour avec Fabiola

Le roi triste va se muer en un homme heureux. Il a été longtemps célibataire. On a longtemps pensé que le monarque portait plus d’attention aux Adonis de passage qu’aux Aphrodite d’une vie. De mauvaises rumeurs qui n’empêchent pas les médias de lui prêter parallèlement des aventures dans toutes les cours européennes. C’est pourtant Baudouin qui va mettre fin à ces articles bassement people que l’on retrouve encore aujourd’hui dans ces mêmes magazines. Le 16 septembre 1960, la radio nationale annonce subitement les fiançailles du souverain avec Fabiola de Mora y Aragón, de deux ans sa cadette.  Baudouin a été immédiatement séduit parc cette infirmière de profession, aristocrate espagnole. Le mariage sera féerique, le couple heureux, mais dont l’amour ne sera pas couronné par la naissance d’un enfant. C’est des années plus tard qu’on apprendra que la reine a fait des grossesses extra-utérines. Un crève-cœur pour cet homme et une femme, tous deux épris de religion. Lorsque Baudouin rendra son dernier souffle, la reine Fabiola se retire dans la dignité, adulée par les Belges qui éprouvaient un véritable sentiment de respect à son encontre. Elle rejoindra finalement son royal époux en décembre 2014, âgé de 86 ans, après des années de lutte en faveur de la protection des femmes et des enfants du Tiers-monde. 

 

 

Un monarque profondément croyant 

Le 30 mars 1990, le roi Baudouin Ier créé la stupeur. Il refuse de signer une loi qui dépénalise l’avortement. Cela va à l’encontre de ses principes catholiques. Une crise éclate et le gouvernement se retrouve face à un véritable acte d’abdication du souverain. Il faudra tout le talent et la diplomatie de ses ministres, un tour de passe-passe juridique pour rétablir le monarque dans ses fonctions et modifier quelques lignes de la loi. Un compromis, un des rares que le roi Baudouin va consentir à faire de toute sa vie. On le dira proche de l’Opus dei, une organisation influente du Saint-Siège sans que la moindre preuve ne soit donnée. Baudouin ne cachait pas son attachement à la foi catholique. « Très tôt, il avait manifesté un intérêt marqué pour les questions de sens et de religion. Au fil des ans, plusieurs aumôniers lui (avaient permis) de creuser sa quête. Et devenu adolescent, c’est tous les jours qu’il désire participer à l’eucharistie – parfois au grand dam de son père » explique Vincent Dujardin, professeur d’histoire contemporaine à l’UCLouvain. « Il a conçu et vécu » son règne comme un véritable service – certains évoqueront même l’image d’un sacerdoce – de la population belge dans son ensemble, ayant à cœur le bien-être de chaque citoyen, au sens « intégral » du terme » ajoute le théologien Christophe Herinckx à son propos, dans un billet qui lui a été récemment consacré.

Lors de son homélie, le cardinal Godfried Danneels n’hésite pas à déclarer : « Il y a des Rois qui sont plus que des Rois : ils sont les bergers de leur peuple (…). Cet homme portait en lui-même une chaleur, une capacité d’écoute et d’empathie à peine imaginable. (…) Oui, à l’exemple de David, le grand Roi de la Bible, le Roi Baudouin était le berger de son peuple. Il privilégiait les petits, les pauvres, les laissés-pour-compte » (…) Comme un bon berger, il n’a pas fait qu’écouter et compatir, il a donné sa vie pour les siens ». Face à un parterre de rois, reines, princes, princesses et autres chefs d’État venus assister à ses funérailles, cette haute autorité religieuse avait résumé en toute simplicité ce qu’avait été au cours de sa vie Baudouin Ier, roi des Belges. Un modèle d'humilité à suivre. 

DR @Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 31/07/2023

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