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Les Huraa, une dynastie qui attend de revenir sur le trône des Maldives

Enjeu géopolitique que se disputent Chine et Inde, les Maldives n'ont pas toujours été une République aux eaux cristallines. Monarchie jusqu'en 1968, les membres de la famille royale attendent toujours leur heure même s'ils semblent oubliés de tous

Les Maldives, un archipel situé dans l'océan Indien, sont célèbres pour ses plages paradisiaques et ses eaux cristallines. Cependant, au-delà de cette image de carte postale, le pays fait face à des défis politiques et géopolitiques complexes. Depuis son indépendance du Royaume-Uni en 1965, les Maldives ont connu une évolution politique marquée par des périodes de dictature, de transition démocratique, et plus récemment, une lutte pour l'équilibre entre autoritarisme et démocratie, avec en fond de toile, une lutte d’influence entre la Chine et l’Inde.

Une monarchie aux racines légendaires

Les premières traces de civilisation aux Maldives remontent à environ 1500 avant J.-C. Les premiers habitants seraient venus du sous-continent indien et du Sri Lanka. La légende raconte même que ses monarques étaient des descendants directs des rois de Kalinga, une région de l'Inde actuelle. Durant l'antiquité, les Maldives se sont organisées en petits royaumes insulaires indépendants. Le système monarchique était caractérisé par des règles de succession parfois complexes, souvent influencées par des alliances matrimoniales et des guerres locales. 

 

Abu al Barakat al Barbari

Sous influence de l'Islam qui balaye le bouddhisme officiel

Les temples bouddhistes ont été les centres religieux et culturels de l'archipel, et les rois étaient souvent considérés comme des figures divines ou semi-divines, un concept commun dans les anciennes monarchies d'Asie du Sud. Le tournant majeur dans l'histoire des Maldives survient en 1153, lorsque l'archipel adopte l'islam comme religion d'État. Ce changement est attribué au roi Dhovemi, qui, selon la tradition, se serait converti à l'islam sous l'influence d'un missionnaire musulman venu du Maroc, Abu al-Barakat al-Barbari. Après sa conversion, le roi prend le nom de Sultan Muhammad al-Adil, marquant ainsi la fondation du Sultanat maldivien. Cette conversion à l'islam va entraîner la construction de mosquées sur tout l'archipel et l'intégration des Maldives dans le monde islamique. Le sultanat devient alors une monarchie théocratique, où le sultan est à la fois le chef de l'État et le défenseur de la foi islamique.

 

Les sultans des Maldives

La colonisation met fin aux pouvoirs des Sultans

Au cours des siècles suivants, plusieurs dynasties se succèdent sur le trône maldivien. Parmi les plus notables figurent la dynastie Hilali, qui règne du XIVe au XVIIe siècle, et la dynastie Isdhoo, qui est au pouvoir du XVIIIe au XIXe siècle. Les successions ne se déroulent pas toujours pacifiquement marquées par des intrigues de cour et des coups d'État. Une situation qui va faire le jeu de pays colonisateurs comme le Portugal, les Pays-Bas ou encore les Britanniques qui vont établir un protectorat sur les Maldives en 1796. Il faudra cependant attendre encore un siècle avant que cela ne soit officiellement formalisé entre Londres et le sultan Muhammad Mueenuddeen II (1886-1888). Dès lors, les sultans qui se succèdent sur le trône vont perdre peu à peu leur autorité. Une couronne qui n’échappe pas aux crises internes, une dynastie qui se déchire. Le Sultan Muhammad Shamsuddeen Iskander III régnera deux fois : en 1893 puis de nouveau entre 1902 et 1934, rappelé et chassé par une révolution populaire.

 

Le sulan Abdul Majeed et Mohamed Amin @wikicommons

Une brève expérience républicaine et le retour de la monarhie

La montée sur le trône du sultan Abdul Majeed en 1944 est suivie par un tragique décès, celui de son fils, le prince Hassan, mystérieusement disparu en mer, son bateau possiblement victime d’une torpille japonaise. Il va régner 11 ans, réformer sa monarchie et même dessiner le drapeau actuel des Maldives. Lorsqu’il ferme les yeux définitivement en 1952, une crise institutionnelle éclate. Le Parlement propose la couronne au Premier ministre Mohamed Amin Didi, descendant par son père du fondateur de la dynastie Huraa. Socialiste convaincu, progressiste, il refuse le trône. Décision est prise de mettre en place un référendum qui met fin à la monarchie. Nommé Président, son mandat sera finalement de courte durée, de janvier à août 1953. Alors qu’il suit un traitement dans l’île de Ceylan, il est victime d’une révolution organisée par son vice-Président Ibrahim Muhammad Didi, désigné chef du gouvernement en son absence et sans l’accord du Président Mohamed Amin Didi, Arrêté à son retour, il est mis en résidence surveillée avant de s’en échapper. Pour son plus grand malheur. Alors que Mohamed Amin Didi tente d’organiser un contre coup d’État, il est lynché par une foule en colère. Il décèdera quelques mois plus tard. En dépit de la poursuite des réformes (notamment en faveur de la condition féminine), l’expérience républicaine est un échec. Un nouveau référendum va consacrer le retour de la monarchie (98%). Le prince Fareed Didi, fils du sultan Abdul Majeed Didi, est couronné Roi des Maldives le 1er mars 1954.

 

Le dernier sultan des Maldives (gauche= et le prince Muhammad Nooraddeen

Une dynastie oubliée des Maldiviens

Un règne qui ne sera pas de tout repos. Les Britanniques exerçant toujours une influence sur les affaires de la monarchie, les Maldives sont secouées par une sécession de différentes îles entre 1958 et 1963. Dirigée par Abdullah Afeef (1916-1993), la République unie Suvadive va être une épine dans le pied de la monarchie mise sous pression par son aristocratie qui exige une réponse ferme après avoir perdue de substantiels revenus. Londres finira par intervenir après avoir hésité à reconnaître cette sécession. La faiblesse dont a fait preuve le sultan Fareed Didi va contribuer à nourrir le mécontentement des Maldiviens.  La proclamation de l’indépendance en mars 1965 ne calme pas pour autant la méfiance des sujets du monarque. Dominé par les Républicains, le Parlement décide de poser la question du maintien de la monarchie à la population lors d’un autre référendum en mars 1968. 81% des électeurs se prononcent pour l’abolition de l'institution royale contre 19% qui souhaitent qu’elle reste en place. A 67 ans, le sultan Fareed Didi n’a plus l’âme à se battre pour un trône qui lui échappe. En novembre suivant, il abdique mais ne part pas en exil. Il est autorisé à rester aux Maldives où il y meurt en 1969.

Dès lors, c’est sn plus jeune frère qui va assumer les prétentions du trône, sans réel parti politique derrière lui, sans le revendiquer pour autant. Le prince Ibrahim Fareed Didi est un polyglotte reconnu, poète à ses heures. Il finira par reconnaître la République et occupera un poste de vice-ministre de la Justice entre 1978 et 1985. On sait peu de choses de la Maison royale et de ce qu’elle est devenue. Un de ses prétendants, le prince Muhammad Nooraddeen (fils du Sultan al-Hasan Nur ud-din Iskander II) a succombé au Covid en 2021, laissant derrière lui 7 enfants dont le prince Ibrahim, potentiellement candidat au trône. Aucun mouvement politique ne se réclame actuellement de la Maison royales des Maldives.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 06/09/2024

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