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Décès de l'une des dernières grandes figures princières du Raj britannique

C'est une des dernières figures du Raj britannique qui vient de s'éteindre. Le prince Shaharyar Muhammad Khan, héritier de l'ancien État princier de Kurwai, était une figure éminente dans le monde de la diplomatie, du cricket, reconnu pour son engagement indéfectible en faveur de la paix et de la coopération internationale.

L'ancien président du Pakistan Cricket Board (PCB), le prince Shaharyar Muhammad Khan, est décédé le 23 mars 2024, à l'âge de 89 ans. L’information a été confirmée par l’organisme sportif dans un message de condoléances publié sur les réseaux sociaux. Il était l'un des derniers témoins du Raj britannique.

 

 

Une enfance princière dans le Raj britannique

Né dans l'État de Bhopal, fils du Nawab Muhammad Sarwar Ali Khan et de la Bégum Abidal Sultan, Shaharyar Muhammad Khan était l’héritier au trône de l'ancien État princier de Kurwai,. Une monarchie fondée au cours du XVIIIe siècle par un officier afghan de l’armée moghole. Tout au long de sa jeunesse, il bénéficie d’une éducation digne de son rang au sein du palais Qasr-e-Sultani (aujourd'hui Saifia College), entouré de plus de 200 domestiques. « Nous habitions principalement dans le salon principal en bas. La salle d'étude de ma mère se trouvait en bas, là où elle travaillait. À côté se trouvait la pièce où nous enseignions. À côté se trouvait la salle à manger et à côté se trouvait un grand salon à l'avant. Tout autour de la maison, il y avait une jolie véranda avec un sol en marbre où nous jouions au cricket », se souvenait le prince. « Le blé et le coton étaient cultivés sur les terres agricoles, exploitées par les métayers. La récolte était distribuée aux agriculteurs et vendue sur le marché », racontait-il avec plaisir.

 

 

La monarchie de Kurwai à l'heure du choix 

« Le matin, avec deux enfants de son âge, il prenait des cours d'ourdou, de Coran et d'islam avec un érudit wahhabite, suivis de cours d'anglais, de mathématiques, de géographie, d'histoire, de sciences, de calligraphie et d'arts avec une gouvernante anglaise. Les après-midis et les soirées étaient réservés au sport, à l'apprentissage des métiers d'art et des instruments de musique ». Une insouciance dont il n’aura pas le temps de profiter. Très rapidement, il se retrouve confronté aux événements qui secouent alors l’Inde. Nationalistes hindous et musulmans s’affrontent violemment sous les regards des Anglais qui tentent de rassembler leurs leaders respectifs autour de la table. Chaque camp se regarde en chien de faïence. « Nous avons commencé à entendre des nouvelles de trains arrivant à Bhopal avec des corps mutilés car c'était à l'époque l'un des principaux carrefours ferroviaires en Inde. Pendant cette période, ma mère avait commencé à réfléchir à la migration au Pakistan, mais elle gardait ces pensées pour elle et pour certains de ses amis les plus proches », raconte-t-il dans ses mémoires.

Blason et drapeau de Kurwai @wikicommons

Cambridge, un souvenir amer

« Le 30 janvier 1948, nous étions à l'école [Daly College], jouions au cricket et au hockey et tout à coup la nouvelle est arrivée que le Mahatma Gandhi avait été assassiné. Ce fut un choc énorme. Tout le monde était abasourdi (...). », se rappelle le prince Shaharyar Muhammad Khan. Véritable héros national de son vivant, le Mahatma Gandhi avait été, un temps, mis en résidence surveillée au palais de Kurwai. La monarchie vivait ses derniers jours. Au départ des Britanniques, le père de Shaharyar Muhammad Khan est sommé de choisir à quel état il souhaite prêter serment de fidélité. Ce sera finalement le Pakistan en 1950, deux ans après l’abolition de la monarchie. Le jeune prince doit partir étudier au Royaume-Uni, dont il sortira rapidement diplômé de l'université de Cambridge. De ses années d’études, il n’en gardait pas un souvenir impérissable. « J'avais passé d'assez bons moments à étudier à Dehradun et à Indore, mais aller en Angleterre a été pour moi un choc culturel. L’étude des sujets n'était pas le problème. Le problème était d'étudier avec des garçons anglais et leur culture. Par exemple, trouver un endroit tranquille pour faire ses prières n’était pas facile car on se moquait de vous. Une autre bizarrerie était que les garçons se déshabillaient les uns devant les autres dans une pièce pleine de monde et que leurs habitudes d'hygiène étaient répugnantes », explique l’héritier au trône.

 

Une carrière diplomatique exceptionnelle

Revenu au Pakistan en 1956, Shaharyar Muhammad Khan gravit rapidement les échelons du service diplomatique pakistanais (notamment comme ambassadeur en Jordanie, au Royaume-Uni et en France), démontrant un talent exceptionnel pour la négociation. C’est d’ailleurs à ce titre qu’il sera nommé au poste de Ministre des Affaires étrangères (1990-1994) et à celui de représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Rwanda (1994 à 1996). En reconnaissance de ses contributions exceptionnelles à la diplomatie et à la coopération internationale, le prince Shaharyar Muhammad Khan s'est vu décerner de nombreux prix et distinctions prestigieux. 

Passionné de cricket, comme son père avant lui, il a occupé la présidence du PCB durant deux mandats (2003-2008 et 2014-2017). Il a également été le fondateur de la Pakistan Super League. Père de deux enfants, c'est le prince Firuz Muhammad Khan (né en 1963), son fils aîné, qui est devenu le nouvel héritier de l'ancien État princier de Kurwai. Le dévouement inlassable à la promotion de la paix et de la compréhension entre les nations du prince Shaharyar Muhammad Khan a été salué par des dirigeants du monde entier.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 27/03/2024

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