Monarchies et Dynasties du monde Le site de référence d’actualité sur les familles royales

Les Bongo et leur rêve éphémère d'une monarchie au Gabon

Président du Gabon depuis 2009, Ali Bongo Ondimba a été renversé par un coup d'État militaire. La nouvelle junte a placé son cousin, le général Nguema, à la tête de cette République, ancienne colonie française. Dans ses mémoires, Jacques Foccart, secrétaire général de l'Élysée aux affaires africaines et malgaches, nous raconte comment les Bongo auraient  tenté de se faire couronner monarques du Gabon avec l’accord de Paris.

La famille Bongo est indissociable de l’histoire du Gabon. Elle doit son élévation au patriarche de sa famille, Albert-Bernard Bongo, devenu Omar après sa conversion à la religion musulmane. Figure incontournable de la Françafrique, ce natif de la province du Haut-Ougoué, va rapidement monter les échelons de l’administration avant d’être repéré par Léon M’Ba, premier président du Gabon. Ancienne colonie française, où a vécu le célèbre docteur Albert Schweitzer, le pays a obtenu son indépendance en 1960. Le Gabon devient rapidement le pion d’un système qui fera et défera les dirigeants africains qui ne satisfont plus aux intérêts de l’Hexagone. Le général de Gaulle et Jacques Foccart, secrétaire général de l'Élysée aux affaires africaines et malgaches, vont profiter de l’état de santé fragile de Léon M’Ba pour favoriser l’arrivée au pouvoir d’Omar Bongo en 1967. Devenu à 32 ans, dirigeant d’un pays riche de son pétrole et de son bois, il restera à la tête du Gabon jusqu’à son décès en 2008. 

Coiffé au poteau par Bokassa

Lorsqu’il adhère à l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), Omar Bongo est au sommet de sa gloire. Le Gabon s’est largement modernisé, l’économie bat son plein, le clientélisme imprime sa marque à tous les niveaux. Enivré par une telle réussite, cet initié de la franc-maçonnerie se met à rêver plus haut. Il lui manque une couronne qu’il entend obtenir de Paris comme le raconte Jacques Foccart dans le Tome 2 de ses mémoires. C’est pourtant, un certain Jean Bedel Bokassa, président du Centrafrique, qui le coiffe au poteau de ses ambitions monarchiques. Devenu Empereur, le maréchal sacré entièrement payé par la France qui finira par se lasser des bouffonneries de Bokassa Ier, renversé trois ans plus tard. Omar Bongo n’est d’ailleurs pas le seul à y avoir pensé. Le maréchal Mobutu, président du Zaïre, avait lui-même songé à se faire couronner Roi des Bantous à l’instar de l’ancien dirigeant du Kasaï, une province sécessionniste du Congo, Albert Ier Kalondji. Une fois la couronne à terre, Omar Bongo aurait patiemment attendu son heure afin de proposer au gouvernement français de bien vouloir transformer son Gabon en un nouveau sultanat pétrolier.

Omar Ier, sultan du Gabon et roi des Tékés, le temps d'un rêve

Réélu avec un score nord-coréen en 1986, Omar Bongo se sent assez fort pour tenter de refaire le coup de Bokassa dont les péripéties s'affichent en « une » des quotidiens français. Tout est prêt. Il suffira d’avoir l’accord de Paris, transformer la République en royaume qui sera validé par un référendum constitutionnel dont l’issue ne fera aucun doute. Il se fera sacrer roi des Tékés, son ethnie, puis monarque du Gabon. Il aurait amors mandaté son héritier, Ali Bongo, afin de convaincre Paris de soutenir ce projet raconté par Jacques Foccart dans le tome deux de ses mémoires. Il aurait rencontré Jacques Chirac, Premier ministre d’un gouvernement de cohabitation peu à l’aise avec cette néo-bokasserie. Ami des Bongo, Jacques Chirac ne se montre décidement guère emballé par cette perspective. « Hors de question de faire du Gabon un royaume ! » répond l’occupant de Matignon à Ali Bongo. Revenu penaud, Ali Bongo entend convaincre son père de persister en arguant du fait que le Gabon est un pays indépendant et qu’il n’a pas besoin de la France pour cela. Son père, déçu par la réponse de Paris, hésite puis recule avant de finalement abandonner son projet aux contours nébuleux, craignant de finir comme Jean Bedel. En prison.

 

 

Une république monarchique 

Si l’idée monarchique avait vécu, sit tant est qu'elle fut réelle comme l'écrit Jacques Foccart, le principe reste. Au décès d'Omar Bongo, son fils Ali lui succède au titre de l’hérédité présidentielle mise en place par le clan familial. Grand maître de la Grande Loge du Gabon, il a fait sa carrière à l’ombre de son père, obtenant des postes de plus en plus importants. Il se servira de son poste de ministre de la Défense pour s’assurer d’une succession tranquille à la tête de l’État. Victime d’un accident vasculaire cérébral en 2018, Ali Bongo en était sorti diminué, laissant des rivalités s’installer au sein de sa propre famille Avec la modification de la constitution lui permettant de briguer un troisième mandat, le « roi Ali » avait fini par épuiser son entourage, jusqu’aux caciques de son mouvement, le Parti Démocratique Gabonais (PDG). Le 30 août au soir de sa réélection, son cousin, le général Brice Clotaire Oligui Nguema , a mis fin au règne d’un monarque népotique dont la couronne ne fut que théorique depuis son avènement. En Afrique, un lion plus jeune vient d'en remplacer un autre plus vieux et sans effusion de sang.  Oyé ! 

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 05/09/2023

Ajouter un commentaire

Anti-spam