Le Cambodge, Sam Rainsy et le « roi fantoche »

Le roi Norodom Sihamoni KT/Khem Sovannara« Le roi actuel vit tranquillement dans son palais comme un perroquet dans une cage dorée, royalement nourri par Hun Sen en utilisant le budget de la nation, et ne montrant aucun intérêt pour les souffrances de son peuple». L’affaire fait grand bruit à Phnom Penh et a mis en colère le gouvernement du roi Norodom Sihamoni. Sur les réseaux sociaux cambodgiens, l’opposant Sam Rainsy a dénoncé la gestion de la pandémie de coronavirus  par le Premier ministre Hun Sen et a accusé publiquement le monarque de n‘être « qu’un roi fantoche, complice des malversations » du leader du Parti du peuple cambodgien. Alors que le souverain est protégé par une loi de crime de lèse-majesté, le ministre de la Justice a ordonné que soient engagées des poursuites contre Rainsy qui a profité de cette fenêtre de tir pour réclamer une modification de la constitution afin de réduire les pouvoirs du fils du roi Norodom Sihanouk.

Norodom sihamoni et hun sen« Proposer de réduire les pouvoirs du roi en amendant la constitution afin de mieux cacher ses crimes [de lèse-majesté-ndlr], est simplement ridicule. Ceci est inacceptable pour le peuple car cela va contre la volonté des cambodgiens » a déclaré le porte-parole du ministre de la Justice, Chin Malin. Le gouvernement du Premier ministre Hun Sen ne décolère toujours pas après son principal opposant Sam Rainsy qui s'est exprimé, il y a trois semaines, sur les réseaux sociaux. Critiquant la gestion de la pandémie de coronavirus par le Parti du peuple cambodgien (PCC), majoritaire au parlement, le fondateur du Parti du sauverage national du Cambodge a dénoncé la mauvaise utilisation  dons récoltés pour aider à l’achat des vaccins, tout en  accusant le roi Norodom Sihamoni se de faire  le « complice silencieux »  des détournements d’argent organisés par Hun Sen. «Tous les Khmers savent, comme moi, que le roi actuel ne s'est jamais occupé de l'état du pays et qu'il n'est jamais intervenu pour défendre les gens du commun qui sont victimes des injustices flagrantes commises sous le régime dictatorial du [Premier ministre] Hun Sen. Le roi actuel vit tranquillement dans son palais comme un perroquet dans une cage dorée, royalement nourri par Hun Sen en utilisant le budget de la nation, et ne montrant aucun intérêt pour les souffrances de son peuple» affirme Sam  Rainsy, ancien député.

Norodom sihanoukMonté sur le trône en 2004 après l’abdication de son père, le roi Norodom Sihanouk dont le destin a marqué l’histoire d'un Cambodge secoué par la dictature des Khmers rouges, Norodom Sihamoni est âgé de 67 ans. Révéré par les cambodgiens, il n’exerce aucun réel pouvoir autres que ceux qui sont protocolaires mais reste à leurs yeux  le « garant de l’indépendance nationale, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Royaume du Cambodge, du respect des droits et libertés des citoyens et du respect des traités internationaux » comme l’indique la constitution de cette monarchie élective. Sam Rainsy a créé la stupeur quand, dans ses déclarations, il a qualifié Norodom Sihamoni de «  roi fantoche qui fait ce que Hun Sen lui ordonne de faire » et appelé à une modification de la constitution. Hors la personne du roi est inviolable et ne peut souffrir de reproches selon la loi sur les crimes de lèse-majesté adoptée en 2018.  «Le roi est un être humain comme nous, pas une divinité descendant du ciel. Tout le monde peut avoir raison ou tort. Si le roi fait une erreur, nous devons avoir le droit de pouvoir le dire  et pourtant la Constitution nous interdit » s’indigne Sam Rainsy qui fait désormais face à des poursuites.  Un prétexte tout trouvé pour le gouvernement qui cherche aussi à mettre fin aux activités de cet opposant dont le parti a été dissous par une loi controversée.

Sam rainsyRoi fantoche ? C’est un reproche que l’on fait souvent au souverain qui s’absente curieusement lors des grandes décisions à prendre, qui passe trop de temps en Chine et qui, dit-on, éternel célibataire aurait préféré le ballet à la couronne de ses ancêtres. « Il est déraisonnable d’exiger de modifier la Constitution relative à l'inviolabilité du roi. Il agit comme un républicain qui ne respecte pas la monarchie cambodgienne » s’est agacé Kin Phea, directeur général de l’Institut des relations internationales de l’Académie royale du Cambodge. L’héritage de la monarchie au Cambodge est un héritage  qui rassemble un millier d'années d'histoire traditionnelle… En fait, après le coup d'État de 1970, la monarchie s'est effondrée et nous avons dû attendre plus de deux décennies pour que la monarchie revienne » rappelle-t-il. Loin d’être ultra–royaliste, Kin Phea a déclaré que le roi respectait strictement les principes de la monarchie constitutionnelle et était reconnu pour sa générosité, sa haute moralité, son attitude philanthropique, sa pratique de la patience et sa gentillesse. « Il ne s’est jamais compromis avec le moindre parti » tempête-t-il encore, rejoint par le Funcinpec, le parti royaliste dont Rainsy a été exclu en 1994, qui a estimé que les propos de l’opposant était une  «insulte grave portant atteinte à la réputation du roi du Royaume du Cambodge, très respecté par le peuple ». S’il est reconnu coupable et arrêté, Sam Rainsy risque entre 5 et 10 ans de prison ferme.

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Date de dernière mise à jour : 20/01/2021

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