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Le duc de Loulé

Après plusieurs années de procédures juridiques lancées contre Dom Duarte de Bragance, fortes en rebondissements divers, celui qui est soutenu par une poignée de monarchistes a été finalement débouté par la cour de justice de Lisbonne. Dom Pedro José Folque de Mendoça Rolim de Moura Barreto, n’est désormais plus autorisé à vendre, faire reproduire ou porter des  insignes de la maison royale de Bragance. Une victoire pour les duartistes qui signe peut-être aussi la fin des prétentions du duc de Loulé sur le trône du Portugal. Un prince ambigu, prétendant sur la tard, qui entretient des amitiés avec différents membres du Gotha européen comme les princes Louis-Alphonse de Bourbon ou Serge de Yougoslavie.

 

20Peu de monarchistes ont entendu parler du duc de Loulé. Qui est-il et pourquoi prétend t-il au trône du Portugal ?  C’est le mariage d’un de ses descendants, Nuno José Severo Mendoça Rolim de Moura Barreto (1804-1875), avec la fille du roi Jean VI qui a propulsé cette maison aristocratique au sein de la famille royale du Portugal. Des épousailles en décembre 1827,  couronnées par la naissance de 5 enfants, qui furent considérées comme un scandale par la faction la plus conservatrice traditionaliste des Portugais,  proche de Dom Miguel de Bragance, déchu de ses droits au trône pour avoir comploté contre le monarque.

« Ce qui est remarquable chez cette famille du Portugal, c’est qu’il n’y a pas un seul fils ressemblant à la soeur ou au frère ... » avait lâché alors la duchesse d’Abrantès, l’épouse du général Junot. En effet, Anne de Jésus Marie de Bragance (1806-1857)  était la fille adultérine du souverain, le seul enfant qu’il n’ait jamais reconnu de son vivant. Une honte et une mésalliance pour les ultramontains qui vont bientôt s’armer et soulever le pays contre la reine Maria Ière Da Gloria, fille de l’empereur Pierre Ier  (IV du Portugal) du Brésil.

Anne de Jésus Marie de Bragance est une constitutionnaliste tout comme son mari. 2 visions de la monarchie qui vont s’affronter dans une guerre civile entre 1828 et 1834, où l’on retrouve même des partisans de Charles X, le dernier Bourbon de France victime d’une révolution en 1830. Le miguelisme fut d’ailleurs au légitimisme français ce que le carlisme fut à l’Espagne du XIXème siècle. Le couple fuit à Londres, refuse de prendre position mais vit des heures difficiles, une fois les bougies éteintes. En 1835, les deux époux se séparent sans divorcer. Anne de Jésus Marie de Bragance vivra à Rome où elle y décède en 1857, âgée de 50 ans à peine. Son mari, franc-maçon, repartira à Lisbonne assumer sa charge de ministre puis de premier ministre (1856185918601865 et 18691870). Un travail, pour ce marquis devenu duc de Loulé, qui ne sera pas de tout repos dans un pays qui menace de rebasculer dans la guerre civile.

« J'ai pris cette position très clairement, mais je dois dire que je n'ai rien contre Dom Duarte et sa famille. Je ne suis tout simplement pas d'accord avec certaines de ses idées , cette manie qu’il  a de se mêler des affaires de la République, en tirant parti de sa tolérance, et le manque d'autres arguments réels qui justifie ses revendications (…) ». Lors d’un entretien accordé à Mondo Portugues en décembre 2018, Dom Pedro José Folque de Mendoça Rolim de Moura Barreto rayonne.  « Entretien avec Son Altesse Royale Vième duc de Loulé -Bragança et Bourbon » titre ni plus ni moins le journal qui offre une véritable tribune à ce prince qui a étudié aux Etats-Unis, travaillé au Brésil, l’Angola et au Nigeria dans le secteur pétrolier. Une prétention loin d’être anodine tant elle empoisonne la « roycosphère » portugaise qui reste très divisée sur le sujet.

Entre 2005 et 2010 sous l’impulsion de son président et ancien député social-démocrate, Nuno Maria de Figueiredo Cabral da Câmara Pereira, le Partido Popular Monárquico (PPM)  avait rallié le duc de Loulé. La raison de ce choix n’est d’ailleurs que peu dynastique mais que pure rancune de l’intéressé, déçu de n’avoir pas reçu la décoration tant attendue et un titre de noblesse avec le « Dom qui va avec » par le duc de Bragance. Depuis lors,  Nuno Maria de Figueiredo Cabral da Câmara Pereira n’a eu de cesse d’attaquer Dom Duarte-Pio  tant sur ses prétentions à travers un livre intitulé « L’usurpateur, le pouvoir sans pudeur » que devant un tribunal au sujet de l’ordre ailé de Saint-Michel.

 

« Dom Duarte serait né à l'étranger, dans une ambassade. Ce qui est faux d’autant que son père était lui-même un étranger en dépit du fait qu’il ait été reconnu par un groupe de monarchistes miguelistes » affirme le duc de Loulé qui rappelle à tous que Dom Duarte est aussi un descendant de Dom Miguel Ier dont la branche est devenue successible à la couronne du Portugal après la mort sans enfants du roi Manuel II en 1932. Soit vingt-deux ans après la chute de la monarchie.

Une prétention au trône qu’il n’assume pour lui-même que depuis peu, octobre 2008, et confiée au cours d’un repas organisé par l’association « Real Monarquia Portuguesa ».qui soutient pourtant Dom Duarte de Bragance.

22 2Il a accepté de prendre son héritage après qu’une délégation de monarchistes, en opposition ouverte avec Dom Duarte,  soit venue lui expliquer qu’il était finalement le mieux placé pour monter sur le trône d’une monarchie « qu’il souhaite constitutionnelle » attachée « aux valeurs qui ont fait de la famille, cette institution sur laquelle nos sociétés se sont forgées «  déclare- t-il à un journal espagnol en 2017.

Une « décision murement réfléchie » peut-on encore lire sur son site officiel où il se fait appeler Dom Pedro VI. L’action menée en justice par ses partisans lui ont été assez favorables pour qu’il cherche des amitiés et de la reconnaissance de ses pairs.

 

Notamment en Espagne voisine où il a rencontré à diverses reprises le prince Louis-Alphonse de Bourbon, duc d’Anjou et prétendant au trône de France à la  Real Gran Peña de Madrid, qu’il soutient ouvertement comme le montre sa page Facebook et son site officiel. Sans doute plus pour irriter le duc de Bragance très proche du comte de Paris, Jean d’Orléans, également prétendant au trône de France que par conviction. Une rencontre en mars 2017 sous le regard de membres du parti conservateur Vox qui accompagnaient le duc d’Anjou et qui souhaitaient mettre en place un mouvement de large ampleur de Madrid à Lisbonne.  Car politiquement le duc de Loulé, qui se déclare étrangement « asturien », bat le « chaud et le froid » tant on ne sait pas trop ou le placer.

Ce n’est pas la seule amitié qu’il entretient. Dom Pedro  José Folque de Mendoça Rolim de Moura Barreto a été reçu  par le prince Luis d’Orléans –Bragance, le  prince Richard von Sayn-Wittgenstein-Berleburg  ou encore le prince Serge de Yougoslavie chez lui pour ne citer qu’eux.

Des prises de positions fortes  parfois comme sur cette Union européenne qui « offre plus de facilités aux Chinois ou aux Pakistanais, contre qui je n'ai rien, qu'aux nationaux eux-mêmes » a-t-il déclaré très récemment. Quelques entretiens, qui n’ont guère d’échos y compris sur les réseaux sociaux. Il a bien quelques soutiens au Brésil, parmi les partisans des Pétropolis, agacés par les prises de positions jugées trop catholiques du duc de Bragance mais elles sont très minoritaires.

Dom Pedro  José Folque de Mendoça Rolim de Moura Barreto persiste. La branche actuelle des Bragance qui prétend à la couronne n’a aucune illégitimité. « Bannie à la suite de la guerre civile, elle reste toujours non–dynaste » déclare ce sexagénaire,  père de deux enfants, un garçon, Henri né en 1997, et une fille Hélène née en 2000. Mais qui tend à rassurer. « Il appartiendra au parlement et au peuple portugais de choisir ».  

Croit-il vraiment à ses chances de monter sur le trône ? Avec un jugement retourné en 2015, qui a donné raison à Dom Duarte de Bragance, et aujourd’hui pleinement en défaveur du duc de Loulé, des partisans qui n’ont jamais eu véritablement d’assises au sein du monarchisme portugais,  ses soutiens ont fini par se réduire comme peau de chagrin. Lui ne doute pas un instant : il est l’héritier au trône du Portugal le plus légitime. « Il ne prétend pas, il est »,  tout aussi simplement que cela.  Pas sûr que les monarchistes portugais le voient encore ainsi aujourd’hui.

 

Frederic de Natal

 

Paru le 19/09/2019

Date de dernière mise à jour : 26/04/2020

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