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Un prince face à la République : l’offensive de Charles-Philippe d'Orléans

En dénonçant ceux qu’il accuse de vouloir « effacer Noël » au nom d’une laïcité dévoyée, le prince Charles-Philippe d’Orléans s’est invité avec fracas dans la guerre culturelle qui agite la France. Une prise de position rare pour un membre d’une dynastie déchue, qui révèle autant ses convictions identitaires que les fractures profondes au sein de la famille d’Orléans.

Rarement un membre d’une dynastie déchue se sera exprimé avec une telle virulence sur la scène idéologique française. En s’attaquant frontalement à ce qu’il qualifie de « gauchistes islamistes », le prince Charles-Philippe d’Orléans, duc d’Anjou, 52 ans,  a déclenché une vive polémique en accusant ces derniers de vouloir « effacer Noël » et, au-delà, de livrer une « guerre » contre l’identité chrétienne et historique de la France.

 

 

Une charge frontale contre l’effacement des symboles religieux

Dans une longue publication diffusée sur ses réseaux sociaux, le fils du prince Michel et de la princesse Béatrice d’Orléans pas mâché ses mots : « Tous les ans, c’est la même chanson, la même comédie idéologique : les crèches et tout autre symbole religieux doivent disparaitre des lieux publics, des mairies, des places de marché… et demain, pourquoi pas dans les églises tant qu’on y est ? On nous explique doctement que c’est pour « respecter la laïcité » et « ne froisser personne ». Une farce. Une supercherie. Une capitulation.  S'en prendre à nos crèches, c'est déclarer la guerre à notre identité.».

Derrière ce qu’il juge être un abus du principe de laïcité, le prince dénonce une capitulation culturelle. Pour lui, l’argument du « respect de chacun » serait devenu le paravent d’un combat idéologique visant à déraciner l’héritage chrétien de la France. S’attaquer aux crèches, assure-t-il, ce serait « déclarer la guerre à notre identité ». Charles-Philippe d’Orléans va plus loin, affirmant que cette dynamique ne répond pas à une demande populaire : «Ce ne sont pas les citoyens qui réclament la disparition des crèches : ce sont quelques islamo-gauchistes professionnels de l’indignation, obsédés par tout ce qui ressemble de près ou de loin à notre héritage. Ils répugnent à voir une Nativité, alors ils veulent interdire à tout le monde de célébrer Noël. Le vivre-ensemble selon eux, c’est simple : tout le monde doit renoncer à ce qu’il est.. ».

Le prince, ancien Grand-maître de l'Ordre de Saint-Lazare, s’appuie sur un constat qu’il estime irréfutable : le succès grandissant des marchés de Noël à travers le pays. Des grandes métropoles aux villages les plus reculés, ces événements attirent chaque année des millions de visiteurs. « Preuve tangible que la fête de Noël n’est pas un folklore réservé à quelques nostalgiques, mais un rituel vivant, partagé, revendiqué », affirme-t-il.

Il fustige également l’évolution du vocabulaire institutionnel : disparition officielle des « vacances de Noël » et de « Pâques », remplacées par des « vacances d’hiver » et de « printemps ». Une neutralisation sémantique qu’il considère comme emblématique d’une rupture assumée avec les racines chrétiennes du pays.

 

 

Une sortie en résonance avec la stratégie identitaire de la droite conservatrice

Cette prise de parole ne surgit pas dans le vide. Elle intervient alors que plusieurs formations politiques, principalement de droite conservatrice, au premier rang desquelles le Rassemblement national, multiplient les campagnes autour de la « défense de Noël » et de la lutte contre ce qu’elles décrivent comme une « crise existentielle de la nation ». À l’international, cette guerre culturelle entre aussi en résonance avec la doctrine portée par l’administration du Président Donald Trump, qui accuse l’Europe d’avoir abandonné ses fondements civilisationnels au profit d’un multiculturalisme perçu comme suicidaire.

Le prince de Charles-Philippe, proche un temps du mouvement Action française,  s’inscrit ainsi, volontairement ou non, dans une dynamique idéologique transatlantique où l’identité, la religion et l’immigration forment un même champ de bataille politique. 

 

 

Un défi lancé au comte de Paris

En 2022, le duc d’Anjou a divorcé de sa première épouse, Diana Alvares Pereira de Melo, duchesse de Cadaval, avec laquelle il a eu la princesse Isabelle (13 ans), avant d’annoncer quelques mois plus tard son remariage avec l’ancienne mannequin Naomi-Valeska Kern. Un choix qui heurte frontalement le principe d’indissolubilité du mariage défendu par l’Église catholique romaine. Le chef de la Maison royale de France, Jean d’Orléans, comte de Paris, est intervenu personnellement pour condamner le divorce et refuser toute reconnaissance officielle du nouveau mariage. En sa qualité de chef de dynastie, il a averti son cousin que toute initiative prise sans son accord entraînerait la perte automatique de son titre d’Altesse Royale, ainsi que de tout titre pour son épouse.

Cette fracture intervient dans un contexte déjà tendu, Jean d’Orléans étant lui-même engagé dans une rivalité dynastique avec Louis Alphonse de Bourbon, soutenu par les légitimistes, pour le trône de France. Le prince Charles-Philippe d’Orléans a pourtant choisi de lui répondre dans des mots qui lui appartiennent comme le rapporte El Mundo dans sa dernière édition : « Je suis né Altesse Royale, prince d'Orléans et petit-fils de France. C'est dans mon sang. Je le resterai toute ma vie . Personne n'a légalement le pouvoir ou l'autorité pour me le retirer. La France est une république. », a déclaré le cousin du comte de Paris.  Malgré les mises en garde de ce dernier, il continue d’utiliser publiquement les titres de duc et duchesse d’Anjou pour lui et son épouse — un titre également revendiqué porté par le prince Louis Alphonse de Bourbon, lui-même cousin du roi Felipe VI d’Espagne. Un titre pour lequel la justice a tranché en faveur du prétendant légitimiste en 1988.

Installé depuis plusieurs années à Monaco, Charles-Philippe d’Orléans mène une entre mondanité, entrepreneuriat et diplomatie d’influence. Proche du prince Albert II, il est conseiller de sa Fondation et développe des projets dans le secteur des énergies renouvelables. Il a été également candidat aux élections législatives pour les Français de l'étranger en 2012 (3%).  En novembre dernier, celui « qui n'est pas Charlie» et critique des Jeux Olympiques de 2024 a annoncé également la naissance prochaine de son premier enfant à venir avec Naomi-Valeska-Kern.

Loin des polémiques familiales et des questions que se posent les royalistes sur les prises de positions du prince Charles-Philippe, ce communiqué sur les crèches de Noël révèle ainsi bien plus qu’un simple coup de colère. Elle illustre la recomposition idéologique d’une partie de l’aristocratie européenne, de plus en plus tentée par les combats culturels contemporains, À la croisée de l’identité, de la religion et de la communication politique, Charles-Philippe d’Orléans s’impose désormais comme l’une des figures les plus clivantes – et médiatisées – de la galaxie monarchiste française.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 09/12/2025