Union des monarchistes népalais

87665940 1529461903877761 5090161704667447296 nC’est une nouvelle fois la presse népalaise qui révèle cette information. Deux ans après sa scission du principal parti monarchiste népalais, son alter-égo, le Rastriya Prajatantra Party -United (Parti national démocratique -Uni) s’apprête (enfin) à fusionner avec son rival, le Rastriya Prajatantra Party, trois fois au pouvoir depuis la chute de la monarchie en 2008. Depuis plusieurs mois, les nombreux allers -retours de l’ex roi Gyanendra Shah au Népal, en Inde et l’accueil favorable que lui réservent ses anciens sujets, ont crispé la majorité communiste qui accuse les monarchistes de comploter contre la république.

Ils sont deux frères ennemis mais combattent pour la même cause. La restauration de la monarchie des Bir Bikram au Népal. Kamal Thapa est une figure de la politique troublée de ce pays montagneux réputé. Deux fois vice –premier ministre (2015-2016 & 2017-2018), il a été aussi le ministre de l’Intérieur du roi Gyanendra Shah. Nationaliste, hindouiste, ce proche du monarque, 65 ans, est un orateur de talent qui draine des milliers de personnes à chacun de ses meetings. En face de lui, un autre poids lourd de la politique népalaise. Pashupati Shamsher Jang Bahadur Rana a été longtemps un ministre du roi Birendra Shah, victime tragique des événements du 1er juin 2001. Ce soir-là, ivre et sous l’emprise de drogues, le prince héritier Dipendra massacre une large partie de sa famille dont ses parents, avant d’être abattu par les membres de la garde royale. Le ministre appartient à la famille Rana, une dynastie de premiers ministres qui aura dirigé le Népal entre 1846 et 1951. Son père fut d’ailleurs le dernier dirigeant de cette caste aristocratique renversée par l’Inde voisine. Une famille qui a une revanche à prendre sur l’histoire. Au milieu des deux hommes, le roi ! Éphémère souverain entre 1950 et 1951, jouet des Rana (dont la fille de Pashupati Shamsher Jang Bahadur a été la fiancée du prince Dipendra au grand dam de la famille royale), la mort de son frère et de son neveu permet à Gyanendra de revenir sur un trône dont il estimait être le seul légitime et absolu détenteur.

Ce n’est pas la première fois que les médias et les partis concernés annoncent la fusion des deux mouvements monarchistes. Leurs divisions sur fond d’égos personnels leur a fait perdre leur place de 4ème opposant au régime. Des 13 sièges au parlement, ils n’en ont plus qu’un seul actuellement. La dernière élection législative de 2017 a été une claque dont a eu du mal à se relever le monarchisme népalais. Il aura fallu l’intervention directe du roi en décembre 2018 pour que les deux leaders se reparlent et entament des pourparlers qui ont abouti à un accord. Selon la presse, le RPP conserverait 55% des sièges du comité central contre 45% pour le RPP-United. Le symbole du parti, jusqu’ici une vache sacrée, devrait même changer. Une révolution.

Kamal Thapa et les monarchistes népalaisLes manifestations en faveur du retour de la monarchie se sont multipliées. A un tel point que le ministre Mohammad Istiyak Rai a réclamé publiquement en avril 2019 l’interdiction des mouvements royalistes et s’est offusqué que l’on s’adresse encore au roi comme « son altesse royale ». Un monarque qui bénéficie encore de larges avantages et qui ne se prive pas de critiquer la république et son gouvernement de coalition d’extrême-gauche. Ces derniers ont d’ailleurs menacé le roi de le traîner devant le tribunal s’il continuait ses interventions intempestives. Ses déplacements sont médiatisés à outrance. La république fédérale doit s’accommoder de son gênant ex-souverain qui bénéficie de l’appui de l’Inde tout aussi nationaliste que les monarchistes népalais. Un voisin qui tente de reprendre pied dans le pays sous influence chinoise Des partis monarchistes qui accusent les marxistes et les communistes d’avoir plongé le pays dans la crise économique et d’avoir laissé installer une propagande chrétienne dans le pays, « cette menace » venue « détruire les fondements sacrés du Népal ». Les royalistes se sont radicalisés sur ce dernier point, n’hésitant pas à s’attaquer aux églises tandis que le roi, lui, continue d’honorer les divinités de l’Hindouisme conquérant. Actuellement en visite dans l’Ouest du Bengale, le gouvernement s’interroge sur les motivations du roi et évoque une stratégie mise en place pour favoriser la restauration de la monarchie.

Le roi peut-il revenir au pouvoir alors que par son intransigeance à vouloir régner seul, il porte une responsabilité dans la chute de la royauté ? Les médias népalais, en langue anglophone, ont consacré plusieurs articles assez éloquents sur le sujet. Le premier ministre KP Sharma Oli, lui-même, s’est fait l’écho des craintes de la coalition qui évoque le « puissant lobby » du roi qui tente d’utiliser la « frustration des népalais à son avantage ». La seule question qui demeure encore sans réponses est bien l’attitude du Congrès Népalais (NC), ancien soutien de la monarchie avant de l’abandonner en 2008. Il demeure le faiseur de rois de la politique népalaise. Une alliance avec le NC (équivalent du parti « Les Républicains » en France) permettrait aux royalistes de revenir au pouvoir par la grande porte et autoriser le roi à remonter sur son trône pour la 3ème fois consécutive. Sans celle-ci, les possibilités de retour de Gyanendra shah sont, à ce jour, peu probables.

Enfin, ombre au tableau, le successeur du roi. Le prince héritier Paras est détesté des népalais qui le soupçonne d’avoir été le bras armé de son cousin Dipendra avec qui il partageait quelques drogues. Des années de fiestas en tout genre qui l’ont affaibli. L’année dernière, une attaque cardiaque a failli avoir raison de lui. Tous les espoirs reposent sur le prince Hridayendra Shah, 17 ans, un temps envisagé comme roi peu avant la chute de la monarchie et avec la bénédiction de l’Inde. Le petit-fils de Gyanendra a d’ailleurs récemment fait ses premiers pas publics au cours d’une cérémonie religieuse. Monarchie théocratique, constitutionnelle ou absolue, c’est au cours du prochain congrès du RPP que les monarchistes vont définir les grandes lignes de leur programme commun avant le début de la campagne pour le renouvellement du parlement en 2022;

Copyright@Frederic de Natal

Publié le 10/03/2020

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